jeudi, 28 mars 2024 23:23

Élections Locales : Lancement Yewwi Askanmi, le début du Mercato politique et la mafia sur les coalitions de partis

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@Atlanticactu.com – Comme de nombreux sénégalais s’y attendaient, les égos surdimensionnés de certains leaders de l’opposition risquaient de plomber la naissance de toute coalition politique. Déjà en 2017, à l’occasion des législatives, la plus belle coalition qui pouvait réduire la puissance de BBY, a sauté en éclats pour des questions de préséance. Quatre ans après, bis repetita, on reprend les mêmes et au final même résultat. Les leaders du PDS, de Bokk Gis Gis, de And Jeef, ont décidé à la dernière minute de tourner casaque. Même si d’autres leaders ont également opté pour mettre en orbite une autre coalition, c’est le lâchage de Pape Diop, Me Abdoulaye Wade et Mamadou Diop Decroix qui demeure le plus impensable. Enquête !

Mais, la politique comme les sénégalais l’ont connu et aimé à travers les joutes oratoires d’un Balise Diagne en passant par Ngalandou Diouf, François Carpot, Léopold Sedar Senghor ou Seydou Cissokho et Majmouth Diop, tend à disparaitre au profit d’intérêts mesquins.

Le champ politique est actuellement pris d’assaut par une multitude d’individus qui, encouragés par le gain facile et un enrichissement sans cause qui fait fureur, sont aptes à ravaler leur vomi à la moindre occasion pour s’offrir, non pas à un programme ou idéal mais à un homme pieds et poings liés. Le Mercato du football était le plus attendu mais, nous avons pu Sénégal, instaurer le Mercato politique à travers des coalitions fallacieuses et intéressées.

Un mercernariat politique que confirme Mr Mamadou Ndoye Mendoza, ancien Secrétaire Général de la Ligue Démocratique (LD/MPT), qui lançait lors d’une émission,  « Macky Sall me recevant en ma qualité de Secrétaire Général de parti, avait proposé de me nommer Ministre Conseiller ou de me remettre 4 millions à la fin de chaque mois » et d’ajouter, « J’ai accepté de prendre les 4 millions que je reversais intégralement à mon parti ». Un véritable pavé dans la mare !

Mais était-ce une surprise ? Que nenni !Il n’y a guère longtemps, Macky Sall numéro 2 du Parti Démocratique Sénégalais et Premier Ministre d’Abdoulaye Wade, ne pouvait pas ne savoir que son mentor finançait les partis membres de la CAP 21 en subsides conséquents si ce n’est des nominations à des postes de responsabilités qui étaient de véritables gouffres financiers. La prévarication de nos deniers publics et le partage toute honte bue de nos principales richesses halieutiques, minières, pétrolières ou foncières, aura comme point de départ cette époque où seule la profession de politicien, pouvait rendre un homme riche.

La rupture prônée et tant attendue depuis 2012, ne sera pas finalement pas au rendez-vous. Car, sans les mêmes hommes, le même système a été vite ressuscité et résultat des course, la création tous azimuts de partis politiques, issus pour la plupart de l’ancien parti au pouvoir. Ces partis cabine téléphonique, comprenant le système, ont vite rejoint la coalition présidentielle afin de continuer de bénéficier des prébendes publiques.

Finalement, pour se donner bonne conscience, nos politiciens ont trouvé la parade en instituant à travers  les coalitions, un véritable Mercato politique. Affranchis des contraintes temporelles ou procédurières, le Sénégal verse davantage dans l’univers irrationnel des coalitions hétéroclites, viviers de marchandages sans scrupules. La formation des coalitions politiques est un phénomène consubstantiel à la bonne vitalité de toute bonne démocratie. Les arrangements et recompositions de l’échiquier politique dans la stratégie de conquête et de mainmise du pouvoir n’est pas l’apanage du Sénégal. Mais au Sénégal, il faut l’avouer, des déclinaisons curieuses du phénomène s’observent. Un véritable mercato au sens plénier du terme s’y déroule entre acteurs de la vie politique. Le marchandage politique est souvent grossier sous nos cieux là où un certain raffinement des pratiques, pourrait faire penser à son inexistence dans les grandes démocraties.

En effet, les coalitions politiques se forment et implosent au gré des circonstances du moment. L’enjeu ici est devenu matériel, alimentaire et la sortie de Mamadou Ndoye n’aura fait qu’ajouter de l’huile sur le feu. D’où la nouvelle trouvaille de la « Mangecratie » à la place de démocratie avec la conjugaison du verbe manger à la première personne du pluriel,  « nous mangeons ». Partage de prébendes issues des régies financières de l’Etat, de postes ministériels, de postes de directeurs généraux et centraux d’administration, de sociétés publiques pour cadres du parti à positionner. Une avilissante conception de la chose publique.

Comment se forment les coalitions au Sénégal ? En fin renards de la politique, Me Abdoulaye Wade comme Pape Diop ou Diop Decroix accepteront-ils une nouvelle bipolarisation de l’espace politique entre Pastef et l’APR comme au temps du PS/PDS ?

Si Ousmane Sonko, Khalifa Sall, Aïda Mbodj, Serigne Mansour Sy Jamil, Dr Abdourahmane Diouf, Dethié Fall, etc ont réussi malgré les coups en dessous de la ceinture à maintenir le cap et lancer l’une des coalitions de l’opposition en vue des locales d’abord, mais pour les législatives et la présidentielle de 2024, c’est parce que ces hommes ont compris que l’exigence des sénégalais ne pouvait plus se négocier autour de beaux discours. Ils ont ensemble fait sienne du mot d’ordre de la rue : « Unissez-vous pour avoir notre soutien, mettez en avant vos petits intérêts, nous vous le ferons payer ».

Même s’il est de plus en plus nécessaire d’encourager cette bipolarisation comme dans toute grande démocratie avec des affrontements programmatiques entre Droite et Gauche, Démocrates et Républicains, Travaillistes et Conservateurs. Inévitablement, même si nos politiciens ont fini de s’asseoir sur les questions idéologiques depuis que les sirènes du Roi Argent, ont commencé à sonner. Qu’un gouvernement sénégalais soit de gauche ou de droite, d’obédience socialiste ou libérale, les politiciens ont contribué à annihiler tout choix du Peuple.

Aujourd’hui, force est de reconnaître que la politique sénégalaise ne se conjugue plus au passé. D’ailleurs, pour preuve, qu’est devenu le tout puissant Parti Socialiste qui a dirigé des indépendances à 2000 le Sénégal? Dans le jargon simpliste, le parti de Léopold Sedar Senghor est devenu une « dame de compagnie » comme le sont les autres formations issues de ses ailes. L’AFP de Moustapha Niass, l’URD de feu Djibo Ka, les Socialistes unis pour la renaissance du socialisme (SURS) d’Abdoulaye Makhtar Diop…. Et au rythme des imprécisions du PDS depuis la chute de Me Abdoulaye Wade suivi de l’emprisonnement de Karim Wade son héritier, il va de soi que la formation libérale rejoindra la cohorte de ces partis qui ne survivront pas après l’exercice du pouvoir.

Si une partie de l’opposition a réussi contre vents et marées à lancer une importante coalition, il va s’en dire que le pouvoir ne va pas assister bras ballants à cette force centrifuge qui avait déjà réussi en 2009 à travers une nette victoire aux locales, à imposer à Me Abdoulaye Wade les changements qui allaient précipiter sa défaite en 2012

Face à un régime déjà en place, allergique au respect aux simples règles démocratique, l’opposition républicaine a un seul choix, s’unir pour battre le pouvoir et pas de critères particuliers. L’essentiel étant la chute du régime en place. Un régime qui lui aussi, cherche à débaucher des « alimentaires » ou « passibles de prison » dans l’opposition, histoire de montrer son « ouverture ». Le critère d’inclusivité et d’ouverture étant cher aux bailleurs de fonds. Conséquence, on est en face le plus souvent de coalitions improbables et hétéroclites qui n’ont rien à envier à une armée mexicaine, qui ne résistent guère à l’exercice du pouvoir ou à la tentation de l’argent. Un véritable ping pong occulte entre politiciens.

C’est l’exemple d’un opposant qui se retrouve dans un gouvernement dit de large majorité pour faire plus esthétique après des élections perdues par son camp. Mais, on ne sera jamais le prix de la volteface mais il est facile d’estimer le cout au vu des changements de niveau de vie du nouveau ministre. L’argent n’aimant ni les yeux encore moins les oreilles. C’est un schéma classique auquel sont habitués les observateurs de la scène politique nationale, pourquoi un tel constat ?

Manque de culture politique des dirigeants ? Non, cela sera une insulte à toute l’intelligentsia sénégalaise. Au Sénégal, la perception patrimoniale du pouvoir par ses ténors comme ses soupirants y est pour une grande part. Le pouvoir étant un haut lieu d’enrichissement réservé à un cercle restreint de privilégiés et ce pouvoir, il faut le conserver à tout prix et l’entretenir.

« Il y’a des partis qui n’ont en réalité ni la science, ni l’électorat requis pour faire valoir un quelconque mérite politique. Juste une existence médiatique disproportionnée. Les dix dernières années ont vu prospérer dans ce pays des théories saugrenues qui ne reposent ni sur une science pure, ni sur une observation empirique de la réalité politique. », selon Pape Sadio Thiam Journaliste/Analyste politique 

Oui, il existe bien « La mafia des coalitions politiques ! » pour qui comme l’indique Pape Sadio Thiam, « Parmi ces théories , il y a cette fausse prophétie (une véritable illusion utile pour les faibles) selon laquelle aucun parti politique ne pourra plus ni gagner seul, ni gouverner seul. Cette curieuse sagesse n’est pas seulement fausse, elle relève d’une véritable escroquerie politique. Car si un parti, à lui seul, ne peut pas conquérir et gouverner, sa raison d’être devient suspecte. »

« Pourquoi ne pas mettre fin à cette myriade de formations politiques les une plus étranges que les autres (il y en a qui sont fantomatiques !) en créant en amont de grands partis politiques. Il y a assurément une incohérence dans cette conception. Car s’unir a priori, se connaître en amont, ficeler des programmes en synergie et développer des stratégies avec le maximum de ressources humaines seraient la voie la plus indiquée que de commencer à se chercher après la perte du pouvoir par l’adversaire commun », s’interroge le Journaliste et Analyste politique.

Oui, il faut le dire : ce qui les réunit et finit par les unir de façon factice et très opportuniste, c’est moins une vision que la haine contre un homme et la soif du pouvoir. Cette sagesse relève d’une escroquerie politique parce qu’elle permet à des gens qui n’ont d’autre légitimité politique que la surenchère médiatique ou verbale pour participer à la gestion du pouvoir.

Le credo « on gagne ensemble, on dirige ensemble » constitue pour la démocratie une approche mafieuse qui inhibe le développement, détruit le patriotisme et dissout les convictions idéologiques. Cette façon de faire de la politique est une honteuse tontine politique qui vide le processus électoral et le suffrage universel de leur substance »

Qu’en serait-il de la redistribution équitable des richesses du Peuple si seuls les gagnants émargeront dans le livre des futurs milliardaires fabriqués grâce à la corruption  ?

Le gouvernement maintenu au pouvoir par la force d’un Mercato politique réussi, prend-il en compte les soins de santé et éducation primaires de base aux populations ? Ce sont là des questions que la conscience sénégalaise de plus en plus alerte est en droit d’exiger. Heureusement que la scène politique sénégalaise ne se résume pas à la description peu reluisante, à la lisière de la caricature. Il y a encore des hommes politiques de valeur, une conscience citoyenne en pleine maturation qui se positionnent comme l’avenir de la démocratie sénégalaise face aux dérives et à la faillite du système partisan. On ne décrète pas la fin d’une élite politique, mais par des valeurs de civisme et d’exercice de la citoyenneté qui sont en train d’enfanter une nouvelle race de dirigeants peu malléables pour le salut de la démocratie sénégalaise et un véritable sursaut national et patriotique.

Pape SANÉ 

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