mercredi, 24 avril 2024 05:06

Sénégal : le Centre d’analyse, de prévision et de stratégie du ministère des Affaires étrangères français  » bénit  » un rapprochement de Paris avec Ousmane SONKO

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Sénégal 
Atlanticactu / Dakar / Pape Sané 
@Atlanticactu.com – Longtemps dépeint comme un anti français, le chef de l’opposition sénégalaise était fuit comme la peste par les chancelleries occidentales. Face à l’impasse dans laquelle  Paris se trouve dans son pré carré en Afrique, une nouvelle stratégie a été élaborée pour sortir du piège du sentiment anti français de plus en plus grandissant. Pour éviter les syndromes d’une rupture populaire comme en Centrafrique, au Mali et au Burkina Faso, le Centre d’analyse, de prévision et de stratégie du ministère des Affaires étrangères français, opte pour une prise en compte des nouvelles aspirations des élites africaines.
Si beaucoup pensent que l’entretien de France 24 et RFI accordé à Ousmane SONKO, relève fine pure coïncidence, c’est ignorer le dilemme dans lequel la France se trouve. Avec l’expansion de la Turquie, de la Chine, surtout de la Russie en Afrique, Paris qui perd du terrain, est obligé de faire contre mauvaise fortune, bon cœur. Pour éviter les ruptures comme avec Bangui, Bamako ou Ouagadougou,  » il est dorénavant plus constructif de faire avec le choix des populations » et non continuer d’imposer des présidents considérés comme des Représentants de l’ancienne métropole. La nouvelle génération de leaders politiques  Succès Masra au Tchad, Ousmane SONKO au Sénégal, Omar Tchiana au Niger, etc sans compter la nouvelle classe dirigeante issue des armées. Des putschistes devenus plus légitimes que les présidents élus souvent apologistes de la corruption et de modification constitutionnelle, objet de troubles sociaux.
Ousmane SONKO est devenu fréquentable aux yeux du Quai d’Orsay dont les stratèges qui ont eu à occuper des postes diplomatiques ou militaires dans la plupart des pays africains, et qui sont les membres les plus influents du Centre d’analyse, de prévision et de stratégie du ministère des Affaires étrangères français, n’ont cessé d’attirer l’attention de l’Élysée sur la perte des positions comme le Sénégal, la Côte d’Ivoire ou le Benin si les paradigmes ne se conforment pas aux réalités politiques actuelles.
De Ouagadougou à Niamey en passant par Bangui, l’hostilité contre la politique française en Afrique ne faiblit pas. L’explication donnée  par Emmanuel Macron paraît un peu courte face au déchaînement des passions qui s’impose désormais en Afrique francophone.
Déjà en décembre 2021, en marge du Sommet Afrique-France, Emmanuel Macron avait invité de jeunes africains à débattre lors d’un panel. Ces jeunes, des Activistes pour la plupart,  l’ont sérieusement « bousculé » en l’interpellant sur des questions liées au franc CFA, du terrorisme au Sahel, à la « France Afrique » ainsi qu’à l’aide au développement. Cette première expérience jugée concluante par les « Experts » africains du Quai d’Orsay, devrait se poursuivre avec les nouvelles figures politiques de l’Afrique notamment francophone. Car, les résolutions de la nouvelle politique française dans ses ex colonies lors de cette rencontre de Charm el-Cheikh, émanaient des propositions de solutions concrètes des jeunes au chef de l’État français
C’est ainsi qu’après avoir prédit dans la « note diplomatique » référencée « NDI-2020-0161812 » l’effondrement de plusieurs gouvernements africains du fait de la gestion du Covid-19 – des prédictions qui se sont réalisées dans la plupart des pays ciblés – plusieurs rédacteurs de ce document dont Manuel Lafont Rapnouil, le responsable du département Afrique du CAPS et l’auteur de la note qui est un africaniste chevronné, Nicolas Normand ancien ambassadeur de la France au Sénégal et Chercheur associé à l’IRIS, ont conseillé vivement à l’Élysée d’éviter de commettre les mêmes erreurs au Sénégal comme ce fut le cas au Burkina Faso, au Mali et en Centrafrique. Des conseils qui ne sont pas rentrés dans l’oreille d’un sourd car le Quai d’Orsay a mis en branle ses instruments de communication que sont France 24 et RFI pour rectifier le tir de positionnement en faveur de Macky SALL, soupçonné de vouloir imposer un troisième mandat illégitime.
En donnant publiquement des gages de garantie à la France lors de son entretien sur France 24, Ousmane SONKO est désormais un partenaire sérieux pour l’Élysée. Car, après les émeutes de Mars 2021 où plusieurs intérêts français ont été attaqués, Paris ne compte pas, après Bamako et Ouagadougou, perdre Dakar. 
En cela, les émeutes de Mars 2021 suites à l’arrestation de Ousmane SONKO le leader de l’opposition sénégalaise, plusieurs intérêts français avaient été la cible des manifestants. Et avec la présence russe au Mali, au Burkina Faso, Paris qui a perdu des positions militaires et stratégiques en Afrique, ne souhaite pas que Dakar soit un syndrome à l’ivoirienne. D’ailleurs, souffle une source diplomatique, plusieurs missions d’experts de plusieurs secteurs de la sécurité, de la politique sénégalaise, sont d’avis que le pire est à craindre au Sénégal si Ousmane SONKO est arrêté une deuxième fois. 
Pourtant, les rédacteurs de la « note diplomatique », avaient plusieurs mois, averti des lendemains sombres pour certains gouvernements et avaient conseillé d’anticiper les conséquences de ce qui est décrit comme une « perte de crédit des dirigeants » africains dont quatre acteurs étaient identifiés comme susceptibles de convoquer « le répertoire de la morale publique » face à la « faillites des gouvernants ». Les « autorités religieuses », d’abord, dont certaines « pourraient vouloir défier l’ordre public pour imposer le leur dans ce moment de faiblesse de l’État  ; les « diasporas » africaines, ensuite, qui d’Europe, se donneront « un devoir d’information civique » en diffusant « des informations fiables lues et diffusées à travers l’Afrique francophone » ; puis les « artistes populaires » qui sont souvent « des autorités morales crédibles » et « façonnent les opinions publiques ». Enfin, dernier acteur identifié, les « entrepreneurs économiques » et autres « businessmen néolibéraux » qui « riches et globalisés » se « positionnent comme les philanthropes du continent ». Ces individus puissants « peuvent jouer un rôle s’ils décident d’engager leurs moyens ou de se poser en intermédiaires entre le système de gouvernance mondiale et l’Afrique ».Dans tous les cas, « ils souligneront la faillite de l’État ».
Pour Emmanuel Dupuy, enseignant en géopolitique à l’Université Catholique de Lille, à l’Institut Supérieur de gestion de Paris, à l’école des Hautes Études Internationales et Politiques et président de l’Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE), «  Il y a une défiance certaine entre la France et les pays africains. Elle est avant tout d’ordre culturelle, s’inscrit dans une longue durée, puise dans un substrat post-colonial laissé en jachère. La présidence Macron a certes été le témoin de cette accélération de défiance, mais n’en n’est pas le seul responsable. Certains qualifient cela de « francophobie ». Je parlerai davantage d’une forme de fatigue, d’impatience quant au positionnement français, sans doute hypertrophié par la résurgence de la coopération militaire face au phénomène terroriste, sur le continent africain. Il y a, ainsi, d’évidence, une remise en cause de la relation entre la France et l’Afrique, et ce, après 60 ans d’indépendance, mais il y a, aussi, différentes Afriques, dont les 36 états africains sur les 54 qui n’ont jamais vécu la colonisation française. »

 

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