vendredi, 26 avril 2024 03:31

Guinée Bissau : « la CEDEAO a commis un coup d’État en violant l’article 145 de la loi électorale », accuse l’avocat Sana Canté

Les plus lus

Près de 6 mois après la « prestation de serment » de Umaro Sissoco Embaló, l’un des candidats à la présidentielle en Guinée-Bissau s’est fait investir président dans un hôtel de luxe, alors que les résultats du scrutin sont toujours contestés par son rival Domingos Simões Pereira. Ce dernier a saisi la Cour Suprême, le recours introduit auprès de la Cour de Justice de la Cedeao, va connaître son épilogue. Atlanticactu a eu un entretien exclusif avec l’avocat Dr. Sana CANTÉ, Avocat à la Cour de Guinée Bissau et Président du MCCI.

Après la volonté de la Cedeao d’installer le candidat Umaru Embalo comme président de la Guinée Bissau, vous avez introduit la Cour de justice de la Cedeao, à quelles fins ?

Dr Sana Canté – Notre action en justice devant la Cour de justice de la CEDEAO contre la Commission de la CEDEAO vise à remettre en cause la légitimité du candidat Umaro Sissoco Embalo en tant que Président de la République de Guinée-Bissau pour possession illégale. Ce recours a été introduit depuis le 11 mai 2020 à la requête des sieurs Noronha Madiu Embalo, Demba Dabó et Isidoro Cassimiro Sá tous mandataires du Mouvement des Citoyens Conscients et non conformes (MCCI)

À ce jour, après le dépôt de votre recours, quels actes ont été posés par la Cour Régionale ? Avez vous l’espoir que cette cause soit entendue ?

Dr Sana Canté –  Comme il est de notoriété publique, les élections présidentielles de décembre 2019 en Guinée-Bissau ont été contestées par le candidat déclaré perdant par la Commission électorale nationale (CNE). Domingos Simões Pereira a introduit un recours devant la Cour Suprême de Justice de la République de Guinée Bissau et dans l’attente de cette action, qui traîne à ce jour aujourd’hui, les résultats des élections présidentielles sont sans effet, en vertu de la Législation Électorale nationale (comme le stipule l’article 145° en suspendant tout effet). Par conséquent, il n’y a pas de président élu en Guinée Bissau. En imposant ou en légitimant un homme à la fonction de président de la République, il est évident que la CEDEAO a commis un coup d’État qu’elle a déclenché contre l’État Bissau guinéen et contre son peuple. Dans le cas contraire, il s’agit d’une ingérence dans la compétence interne de l’État Bissau guinéen, conformément à l’article. 2/7 de la Charte des Nations Unies et une violation des droits de l’homme du peuple de Guinée-Bissau pour le choix de son propre représentant démocratiquement élu conformément à la loi et de la disposition d’un système judiciaire indépendant et sécurisé. Avec cette action, nous pensons que le Tribunal judiciaire de la CEDEAO rendra justice équitable à l’affaire.

Nous espérons que notre dossier sera entendue lors de la prochaine session de la Cour de Justice. Tous les actes de procédure ont été posés et pris en compte par le Greffe. En plus, il s’agit de magistrats respectables et respectueux du droit donc, nous ne craignons pas de ce point de vue que le droit ne soit pas dit.

Si par extraordinaire la Cour donnait raison à votre client, le candidat du Paigc, DSP, pensez-vous que les chefs d’état de la Cedeao vous aideront à faire appliquer une décision ?

Dr Sana Canté – Premièrement et pour votre information, notre client n’est pas le candidat Domingos Simões Pereira l’un des candidat à la présidentielle, mais plutôt trois ressortissants Bissau Guinéens, membres de l’organisation que je préside : Le Mouvement des Citoyens Conscients et non conformes (MCCI). Compte tenu de la nature de la violation par les normes des lois nationales et internationales, tout citoyen guinéen a la légitimité de demander à la Cour de la CEDEAO de restaurer le repositionnement de la normalité constitutionnelle. Et c’est ce que nous exigeons. Deuxièmement, nous pensons que les juges des tribunaux de la CEDEAO préserveront leur intégrité morale et professionnelle pour trancher l’affaire conformément aux lois et aux règlements en vigueur, sans être influencés par les positions politiques des Chefs d’État. Et enfin, si nous remportons cette affaire, nous croyons que nos actions seront respectées par toutes les organisations internationales et les États. Si cela ne se produit pas entre-temps, cela sera participera à la double violation de la juridiction interne de l’Etat Bissau guinéen, il sera, donc évident, que les Etats membres ne roulent pas pour la démocratie et pour l’Etat de droit.
Et cela serait un précédent dangereux pour tous les hommes politiques à qui on pourrait ôter le suffrage légal émis par des citoyens au profit d’obscurs intérêts.

Aujourd’hui, Embalo est intronisé président de la République de Guinée Bissau sans une décision de votre Cour Suprême, les actes qu’il pose sont-ils légaux ?

Dr Sana Canté – Le candidat Umaro Sissoco Embalo ne peut être considéré que comme un président de la République putschiste en attendant le procès. Les militaires que les chefs d’état de la CEDEAO traitent de putschistes au Mali, ne sont pas différents de Umaru Embalo. Pourtant, logique pour logique, si la CEDEAO peut octroyer le pouvoir à un président illégitime en Guinée Bissau en foulant aux pieds la Charte Nationale, pourquoi ne pas concéder aux populations maliennes de mettre fin à une présidence de corruption et mieux. Qui peut le plus peut le moins.

Avec ce combat engagé contre le régime auto-proclamé de Embalo, vous n’êtes pas menacé, vous ne craignez pas pour votre vie ?

Dr Sana Canté – Les menaces du régime du putschiste Umaro Sissoco Embalo Candidat à la dernière présidentielle sont fréquentes contre moi. Tout mon entourage a peur pour ma vie, mais ce n’est pas ce qui risque de  me démotiver. Le patriotisme et l’amour inconditionnel pour mon pays, la lutte pour la défense de l’État de droit démocratique sont les facteurs qui me poussent et soutiennent mon engagement à la hauteur de tout défi.

Vous savez , on ne va pas accepter à nouveau le règne de la peur en Guinée Bissau. Chez les vrais Narcos en Amérique du Sud, la règle était « Plomo o Plata » et pourtant des hommes politiques comme Alvaro Uribe en Colombie, se sont battus fermement au risque de leur vie pour traduire les criminels en prison. Aujourd’hui, le monde est un village planétaire et il est impensable que Umaru Embalo quelque soit ses soutiens dans l’espace CEDEAO, puisse se permettre de continuer de poser des actes extrajudiciaires.

Dr Sana Canté, votre dernier mot à l’endroit des lecteurs de Atlanticactu

Tout d’abord, je tiens à féliciter votre journal pour l’intérêt que vous portez à l’Afrique de l’Ouest avec des traitements qui permettent d’avoir une visibilité politique, sécuritaire et stratégique sur ce qui passe autour de nous. Mais, mon principal bonheur est voir le suivi du traitement de l’information en Guinée Bissau depuis la campagne électorale de décembre dernier à ce jour, cela nous donne l’espoir de penser que les Bissau guinéens ne sont une entité à part. Merci de votre intérêt pour notre cause. Que Dieu bénisse l’Afrique !

Propos recueillis par

Pape Sané 

Plus d'articles

2 Commentaires

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Les plus récents