@Atlanticactu.com – À la suite des accrochages entre militaires sénégalais et rebelles du MFDC survenus au mois de janvier à la lisière de la frontière Sénégalo-gambienne, Atlanticactu.com s’est intéressé aux potentielles sources d’approvisionnement en armes des partisans du chef de l’aile Nord du mouvement irrédentiste. Des pratiques « tolérées » par les forces de sécurité gambiennes concernant les propriétaires de campements de chasse, peuvent être considérées comme l’une de ces causes. Plusieurs trafics allant des armes aux munitions en passant par les voitures et les prostituées sont en cours dans le campement de Fatoto du sieur Max Bailloux situé sur la frontière entre les deux pays.
Au mois de mars de l’année 2020, un groupe de chasseurs composé de six Français et quatre Sénégalais a été arrêté à Basse pour des infractions de détention d’armes à feu sans autorisation. Les militaires gambiens postés sur la frontière d’avec le Sénégal, ont procédé à l’arrestation de 6 français armées de fusils automatiques à Fatoto à quelques kilomètres de Vélingara. Ces individus auraient quitté le village sénégalais de Gouloumbou pour se rendre à Fatoto après une brève excursion de chasse en territoire sénégalais.
A l’époque, les villageois avaient alerté l’armée gambienne en voyant ces hommes armées déambuler à travers la forêt. Une fois arrêtés, les mis en cause ont été remis aux policiers qui après enquête, ont déféré les six français devant l’Attorney général pour possession d’armes à feu illégales séjour irrégulier en Gambie. Les mis en cause resteront plusieurs mois en prison avant d’être libérés , expulsés et leurs armes confisquées par la police. Des informations confirmées à l’époque par le Major Lamin Sanyang, porte-parole de l’armée gambienne.
Outre les dizaines armes et des minutions, des prostituées sénégalaises, de l’alcool, de la nourriture, des voitures 4×4… passent en toute illégalité à travers les pistes sans rien déclarer. Et pourtant, pour chaque saison de chasse, Max Bailloux reçoit 40 chasseurs/saison représentant 120 000€ (78.000.000 francs CFA) sans payer d’ammonisations à Banjul.
D’ailleurs, Atlanticactu a pu retrouver la trace de ces malheureux chasseurs qui ont à croupir dans les geôles gambiennes et leurs témoignages sont les mêmes : Il y a deux ans, nous étions en prison et nos armes confisquées (article de presse d’Atlanticactu 12 mars 2020) parce que M. Bailloux n’a fait aucune déclaration aux autorités gambiennes. Et c’est une fois dans son camp et nous avons remarqué ses pratiques frauduleuses.
Cette affaire n’était que l’arbre qui cache la forêt car lors de l’enquête de police, ces hommes ont expliqué avoir payé au propriétaire du campement de Fatoto depuis l’Europe pour une partie de chasse. Et que ce dernier, Max Bailloux leur avait garanti avoir payé toutes les autorisations nécessaires. Ce qui n’était pas le cas puisqu’ils ont été arrêtés par la suite.
Selon une source policière, « Ce Max Bailloux a instauré un système tellement huilé avec les autorités de l’immigration comme de la douane. Plusieurs armes « passent » entre les mailles du filet et malheureusement, nous ignorons dans quelles mains ces armes peuvent finir ». Et notre interlocuteur de révéler, « Des armes de tout calibre circulent librement en Gambie car avec des dollars ou des euros, nos supérieurs ferment les yeux meme si c’était un char de combat. C’est pourquoi, nous sommes vivons dans une insécurité notoire depuis la chute de Yaya Jammeh et cela n’épargne pas le Sénégal également ».
Pour Lamin Colley un ancien policier du CID, « J’ai une fois effectué une descente dans ce campement suite à une dénonciation des riverains. Mais, grande a été ma surprise d’y trouver plusieurs filles d’origine sénégalaise entreposées comme du bétail dans deux bâtisses. Ces filles étaient des travailleuses du sexe recrutées depuis Dakar pour assouvir la libido de ces chasseurs ». « Mais quand j’ai décidé d’arrêter le propriétaire du campement pour proxénétisme, traite humaine, mes supérieurs m’ont sommé de me retirer des lieux », a poursuivi l’ancien policier.
Sans contrôle sérieux sur l’entrée des armes en Gambie, ne sera-t-il pas plus indiqué pour les autorités sénégalaises de s’intéresser à la destination finale de ses armes quand on sait que la zone pilule de bandes armées et pas loin des positions du MFDC.
« Mes supérieurs comme les autorités sénégalaises sont au courant que Monsieur Bailloux a créé une route à travers la forêt PK12. Après la chasse, les armes sont cachées dans le bâtiment principal. D’ailleurs, sur l’une des photos on peut voir le stock de munitions jamais déclaré à la douane », balance Lamin Colley.
Des propos qui seront confirmés par Ève Fall et Bijou Ba (des noms d’emprunt) trouvées sur place. « Cela fait trois ans que nous venons ici. Nous avons été recrutées dans un célèbre bar restaurant des Almadies où le gérant est également propriétaire d’un campement de chasse situé de l’autre côté de la frontière. D’ailleurs, c’est à partir de ce campement qu’on nous fait passer clandestinement en Gambie par des pistes pour rejoindre le campement de Max Bailloux ».
« Certes il y’a des risques parce qu’il peut arriver que l’on tombe sur des pervers qui vous brutalisent car l’alcool coule à flot ici. Pire, les conditions hygiéniques comme vous le voyez sont extrêmement déplorables et c’est pourquoi après notre retour, tout l’argent gagné est dépensé en soins médicaux », nous révèle Ève qui dit être originaire de Saint-Louis.
Sur place, avons tenté de joindre le couple Bailloux au +221 77 230….en vain. L’un des pisteurs trouvé sur place a refusé se prononcer acceptant juste nous montrer la bâtisse qui leur servait de dortoir et qui ne disposait pas de toilettes. « Nous sommes traites comme des esclaves et nous ne pouvons nous plaindre aux militaires », consent-il à nous dire en désignant le cantonnement militaire situé pas loin.
Contacté par nos soins sur ces graves accusations, les services de Lamin B. DIBBA le Ministre de la Forêt, de l’Environnement, du Changement Climatique et des Ressources Naturelles, ont promis de nous revenir depuis une semaine.