lundi, 29 avril 2024 15:20

Sénégal : Conséquences de l’arrestation de Ousmane Sonko, Guinée Bissau et Gambie craignent un effet domino

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Après les jours de la semaine dernière émaillés de manifestations suivies de violences, pillages, actes de vandalisme et morts, le Sénégal panse ses blessures. Mais le lundi 8 mars, avant que le Doyen des Juges ne décide de placer l’opposant Ousmane Sonko sous contrôle judiciaire dans l’affaire présumée de viols et l’appel au calme lancé par le Président Macky Sall dans la soirée, Dakar et l’intérieur du pays avaient vécu des sombres où le pouvoir était presque dans la rue. Sortis de cette épreuve, les sénégalais se posent des questions quand en Gambie ou en Guinée Bissau voisines, on craint l’effet contagion.

Les opposants au pouvoir du Président Macky Sall ont célébré la remise en liberté du député Ousmane Sonko lundi 8 mars. Visé par une enquête pour viol, il a été libéré sous contrôle judiciaire. Les familles religieuses, la Société Civile également sont comme le pouvoir, en train de s’interroger sur les causes de cette escalade de violences généralisées jamais vécues au Sénégal. Même si le point commun pourrait être la justice sélective qui a eu raison de Khalifa Sall et Karim Wade deux opposants notoires et qui dans cette affaire Adji Sarr/Ousmane Sonko, allait certainement jouer les organisateurs des « primaires » électorales comme en 2019 et 2017.

Si les sénégalais ont pu sortir de cette situation avec beaucoup de pertes en vie humaine, des blessés, des arrestations et une économie quasiment à terre du fait des destructions constatées, ils le doivent plus au professionnalisme des forces de sécurité et de défense. Malgré les cas de décès et de blessures, il est à noter que le pire aurait pu se produire notamment avec l’immixtion des nervis armés pour casser du manifestant. Leur présence est-elle à l’origine du nombre de morts et blessés relevés en quatre jours de manifestations ? Tout porte à le croire même si, à ce jour aucune autorité n’a voulu se prononcer sur la présence de ces gros bras.

Des gros bras que les sénégalais avaient l’habitude de voir dans les cortèges des hommes politiques à l’occasion des meetings ou campagnes électorales mais, qui ont été invités et encadrés pour illégalement violenter des sénégalais qui ont répondu à l’appel à la résistance lancée par Ousmane Sonko, leader du Pastef, le principal parti d’opposition. La crainte suscitée par les violences engendrée par ces nervis a fini par installer une psychose tant au Sénégal qu’au niveau de certains pays frontaliers et dont les chefs d’état sont connus pour leur proximité avec Macky Sall.

En Gambie et en Guinée Bissau, la Société Civile et l’opposition comptent un effet domino des manifestations monstres au Sénégal quand les dirigeants craignent le pire. Umaru Embalo et Adama Barrow pas du tout rassurés sur une déliquescence de la situation politique à Dakar qui pourrait ne pas être maîtrisée surtout avec la crise actuelle 

Tant en Guinée Bissau qu’en Gambie, c’est un secret de polichinelles de dire que les populations de ces deux pays ont toujours dénoncé « l’immixtion » de Dakar dans leur cuisine interne. En Gambie, depuis la chute du dictateur Yaya Jamneh et l’installation du Président Adama Barrow sous forte escorte de l’armée sénégalaise et de la CEDEAO, nombreux sont ceux qui crient à « l’annexion » de ce pays anglophone enclavé dans le Sénégal. Pire, certains opposants comme Usainou Darboe, Hallifa Sallah ou Mana Kandeh, dénoncent la présence militaire sénégalaise.

Un sentiment anti sénégalais de plus en plus visible, selon Amadou Tine, un restaurateur établi à Banjul depuis une vingtaine d’années. « Avant, on avait pas de problèmes meme si le régime de Jamneh était très dur. Nous étions protégés, nous n’étions pas rackettés contrairement à maintenant », nous confie le propriétaire du restaurant « Keur Ndèye ». Et, le plus grave, poursuit Amadou Tine, « Aujourd’hui, les gambiens ne cachent plus leurs sentiments à notre égard, nous reprochant d’avoir colonisé le pays. Mais le plus grave, c’est le discours acerbe des politiques surtout aujourd’hui quand le Président Adama Barrow s’est rendu à Dakar ».

Avec le déplacement du Président Adama Barrow hier mercredi à Dakar alors que les sénégalais pansent leurs blessures, dans les réseaux sociaux, on assimile ce déplacement à une prise d’ordre auprès de Macky Sall. A Bissau, tout le monde craint que la grève générale ne dégénère surtout avec la venue de Domingo Simoes Pereira les jours prochains.

Si en Gambie malgré la présence militaire sénégalaise, la proximité entre les deux peuples fait qu’il y’a encore beaucoup de retenu dans les propos pour dénoncer la présence militaire étrangère en terre gambienne. Ce qui est loin d’être le cas en Guinée Bissau où celui qui a été installé par la CEDEAO en plein contentieux électoral, ne rend pas les choses faciles. Umaru Embalo pour ne pas le nommer, installé en février 2020, n’a cessé de braquer les populations et l’opposition de manière particulière. Entre emprisonnement, bastonnades publiques, arrestations arbitraires et kidnapping, le « Général » a fait amplifier le sentiment anti sénégalais.

Pour l’avocat Clément Biague, « Ici c’est clair pour tout le monde que c’est Macky Sall qui est derrière Umaru Embalo. Et cela est d’autant plus évident qu’à chaque fois que les tenants du pouvoir ont des bisbilles, ils se retrouvent à Dakar pour trouver une solution ». Pour le juriste, « C’est Umaru Embalo en personne qui a dit publiquement que le président sénégalais donne de l’argent à tous les politiciens Bissau guinéens. Cette affirmation a fini de convaincre tous que les ordres viennent de Dakar ».

« Nous avons toujours coopéré avec les différents présidents sénégalais et cela a toujours été productif pour nos deux pays. Mais, en nous imposant Umaru Embalo qui comme Macky Sall, emprisonne ou exile les opposants, le sentiment le plus partagé est que le Sénégal est juste intéressé par les ressources pétrolières Bissau guinéennes », révèle Simoes Vieira du PRS. Des propos confirmés par Cheikh Abdoulaye Touré l’un des représentants de la communauté mouride, « Je suis dans ce pays depuis 2007 et je n’ai jamais eu de problèmes mais, aujourd’hui, c’est comme si nous étions responsables de la présence de Umaru Embalo à la tête du pays et, à chaque occasion, certains n’hésitent pas à te le faire savoir de manière violente ».

« Avec la grève générale des travailleurs qui sont sans salaires depuis plus de six mois et l’arrivée de l’opposant Domingo Simoes Pereira cette fin de semaine, tous les commerçants craignent le pire », confie Cheikh Abdoulaye Touré.

Cheikh Saadbou Diarra 

 

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