Le Président tunisien Kaïs Saïed a décidé, mercredi soir, de supprimer l’instance provisoire de contrôle de la constitutionnalité des projets de loi, de légiférer par décrets présidentiels et d’exercer le pouvoir exécutif avec l’aide d’un gouvernement, renforçant de facto ses prérogatives au détriment du Parlement et du gouvernement.
La Tunisie est en proie à une grave crise politique depuis que le chef de l’Etat avait décidé le 25 juillet de révoquer le Chef du gouvernement Hichem Mechichi, geler les pouvoirs du Parlement pour une durée de 30 jours, et de lever l’immunité des députés dans le cadre de mesures d’exception. Kaïs Saïed avait annoncé également qu’il s’arrogeait le pouvoir exécutif avec l’aide d’un gouvernement dont il désignera le chef et a procédé dans les jours suivants à une série de limogeages de ministres et de hauts responsables dans l’appareil de l’Etat.
Le président tunisien Kaïs Saïed a pris mercredi des dispositions exceptionnelles portant organisation des pouvoirs exécutif et législatif, qui ont fait l’objet d’une série de décrets publiés dans le Journal Officiel de la République Tunisienne (JORT).
« Les textes législatifs sont pris sous forme de décret-loi. ils sont promulgués par le Président de la République qui ordonne leur publication au JORT », lit-on dans le texte intégral du décret présidentiel n° 2021-117 du 22 septembre 2021, relatif aux mesures exceptionnelles.
En vertu de ce nouveau décret, « le pouvoir exécutif est exercé par le Président de la République assisté d’un gouvernement dirigé par Premier ministre ».
L’essentiel du pouvoir exécutif était aux mains du gouvernement jusqu’à ce que Saïed annonce ses mesures d’exception.
Des détracteurs affirment que Saïed, qui a assumé la présidence en 2019, vise, – à travers les nouvelles dispositions -, à faire pencher la balance en faveur du système présidentiel au détriment du système parlementaire prévu par la Constitution de 2014.
Par voie de communiqué publié mercredi, la Présidence de la République a indiqué maintenir la suspension de toutes les activités du Parlement, ainsi que la levée de l’immunité parlementaire de tous les députés et mettre fin aux indemnités et privilèges accordés au président du Parlement et ses membres.
Il a été également décidé, la suppression de l’instance provisoire de contrôle de la constitutionnalité des projets de loi.
La majorité des partis ont rejeté les décisions de Saïed, prorogées sine die en date du 24 août écoulé. Certains partis ont qualifié ces décisions de « coup d’Etat contre la Constitution », tandis que d’autres formations politiques l’ont considéré comme étant une « restauration du processus », sur fond de crises politiques, économiques, et sanitaires (Covid-19).
La Présidence a ajouté que Saïed se chargera « de l’élaboration de projets d’amendements relatifs aux réformes politiques, avec le concours d’une commission qui sera créée par décret présidentiel ».
Au cours des derniers jours, plusieurs partis ont annoncé leur rejet de l’abrogation de la Constitution par Kaïs Saïed, mettant en garde contre le retour de la tyrannie et de l’autoritarisme, après la révolution de 2011 qui a renversé le régime du Président Zine El Abidine Ben Ali (1987-2011).