@Atlanticactu.com – La toute nouvelle victoire des Talibans vingt (20) ans après celle obtenue sur les russes, prouve plus que jamais qu’on ne peut compter sur l’autre pour assurer sa sécurité. En l’espace de quelques jours, les Talibans sont de nouveau les maîtres de l’Afghanistan comme les groupes armés ou Djihadistes supposés, sont devenus les seigneurs du Sahel. Conscients d’une défaite pire que celle du Vietnam, les soldats américains ont opté pour le retrait comme les français de la Force Barkhane ont senti le vent de la raclée sonner comme lors de la guerre d’Algérie. Après la conquête de plusieurs régions du pays les unes après les autres, parfois sans combat, le 15 août 2021, la capitale Kaboul est tombée.
Les Yankees ont senti le vent de la défaite souffler comme ce fut lors de la guerre du Vietnam. Ils n’attendront pas l’arrivée des Talibans qui avaient défait l’armée soviétique en 1988 après près de dix ans d’occupation de l’armée rouge. La résistance afghane était fractionnée à l’époque en une multitude de groupes, et les tendances radicales (on ne disait pas encore djihadistes), s’étaient renforcées au fur et à mesure de la guerre et des crimes de l’Armée rouge. Mais, pour le président américain d’antan Ronald Reagan et les Occidentaux, c’étaient des « combattants de la liberté » qui affrontaient « l’empire du Mal », parés de toutes les vertus de preux chevaliers, tellement émouvants dans leurs costumes traditionnels.
Le roi est mort, vive le roi. En Afghanistan, les nouveaux hommes forts du pays s’appellent les « Talibans ». Chassés du pouvoir il y a 20 ans, ils sont de retour. Avec le retrait des soldats américains, ils ont reconquis le pays presque sans difficulté. Ils ont ainsi obligé le président Ashraf Ghani à fuir le pays. Cette victoire des Talibans montrent deux leçons essentielles. La première, c’est qu’on ne confie pas la sécurité de son pays à des étrangers. Pendant longtemps, ce sont les Occidentaux qui sécurisaient ce pays arabe d’Asie.
C’est connu, il n’y a rien pour rien. S’ils y étaient, c’est qu’ils y avaient des intérêts bien plus importants. S’ils plient bagage, cela veut dire également qu’ils n’ont plus besoin de vous. Pendant leur présence, les Afghans dormaient certainement. Ils se reposaient sur leur lit douillet. Malheureusement, ils ne connaissent pas l’Afrique et ses proverbes. N’est-ce pas qu’un proverbe moaga rappelle que quand on dort sur la natte d’autrui, on dort à terre ? « C’est ça qui est là ».
La défaite américaine en Afghanistan signe donc avant tout le fiasco d’une de ces guerres ingagnables et de leurs différentes déclinaisons du Sahel au Kurdistan, de la Palestine au Yémen, qui alimentent ce qu’elles prétendent combattre. Combien de temps faudra-t-il pour en tirer les leçons ?
La deuxième leçon, à notre avis, c’est le sens de combativité des Talibans eux-mêmes. Pendant 20 ans, ils ont cru. Ils n’ont jamais lâché prise. Le retour au pouvoir a été une lutte de longue haleine. Cette victoire est le fruit de la sueur et du sang. Ils ont un idéal propre à eux. Ils ont une idéologie en laquelle ils croient. Pour l’accomplir, à leurs yeux, aucun sacrifice n’était de trop. Ils ont bataillé pendant longtemps.
Des hommes, des femmes et des enfants sont morts. Mais leur sacrifice n’a pas été vain. C’était pour une noble cause pour eux. Ainsi, c’est la preuve que le succès est au bout de l’effort. C’est la preuve que quand on lutte, quand on est tenace, on sort forcement vainqueur.
Ces deux leçons, les Africains doivent les retenir. Nous avons, certes, des réalités différentes mais elles se ressemblent quand même. Nous tentons aujourd’hui de sous-traiter notre sécurité avec des puissances occidentales. Nous comptons sur des personnes étrangères. Et à la face du monde, l’Occident toute puissante a baissé pavillon devant les enturbannés qu’ils avaient réussi à bouter hors du pouvoir. Comme au Mali, la situation risque de de reproduire, selon Christian Essowe, spécialiste des relations internationales pour qui ,« quand la France et sa coalition ont chassé les djihadistes en 2012, une nouvelle ère démocratique et le respect des droits de la personne étaient promis aux Maliens… Or l’espoir qu’ils ont nourri ne s’est pas matérialisé jusqu’à présent ».
Kaboul est tombée et il n’aura fallu que quelques semaines aux talibans pour balayer l’armée afghane financée et formée par les États-Unis durant vingt ans. Pour rappel, le régime communiste avait survécu trois années au retrait de l’Armée rouge. Mais le désastre afghan, au-delà d’une défaite ponctuelle, signe le fiasco de « la guerre contre le terrorisme ».
Pourtant, ces partenaires ont suffisamment montré sur le terrain leurs limites. Il y a bien longtemps que nous sommes épaulés dans la lutte contre le terrorisme. Malheureusement, l’on a l’impression qu’on s’enfonce de plus en plus dans le gouffre, malgré le soutien. Cela veut dire simplement que quelque chose ne va pas quelque part.
L’autre aspect, c’est certain, le terrorisme ne finira pas aujourd’hui. C’est pourquoi, les Africains doivent faire preuve de résilience, de ténacité. Il faut se préparer pour une lutte de longues années. L’essentiel, c’est qu’en recevant des coups, l’on puisse aussi lâcher des coups. Nous devons rêver pour notre idéal commun. Pour l’amour de nos pays, nous devons être endurants. Nous devons persévérer. Nous devons être fiers de mourir pour nos nations. La meilleure façon de vivre, c’est de compter sur soi-même. Si après, ton ami vient t’appuyer, c’est un plus. Cela est aussi bon à prendre.
Pourtant, après janvier 2012, face au MNLA, Mouvement National de Libération de l’Azawad, groupe nationaliste et indépendantiste à majorité touareg, qui revendique la scission du Mali et l’indépendance touareg au nord ; mais aussi le MUJAO, Mouvement pour l’Unicité et le Djihad en Afrique de l’Ouest, un groupe armé islamiste et djihadiste à majorité arabe, et qui prône l’application de la charia sur tout le territoire malien, la France et ses alliés se lancèrent dans une nouvelle croisade, « la guerre contre le terrorisme », et envahirent le Mali. Mais, comme les Soviétiques hier et les américains aujourd’hui en Afghanistan, ils allaient s’enliser dans un conflit sans fin ni espoir de victoire. Les « frappes chirurgicales » tuaient, à côté des talibans, de multiples innocents ; les attentats provoquaient des représailles qui n’épargnaient pas les civils ; et « la pacification » poussait de plus en plus de Maliens dans l’exil ou dans les grandes villes.
Cheikh Saadbou DIARRA