vendredi, 22 novembre 2024 13:42

Sénégal : Trafic de passeports diplomatiques, « Je n’irais pas seul à l’abattoir », avertit un député

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Malgré l’indignation suscitée par l’éclatement d’un trafic de passeports diplomatiques au sein de l’hémicycle, les sénégalais risquent de ne jamais connaître le mot de fin de cette lugubre affaire qui entache cette législature, l’une des plus décriées du Sénégal indépendant. Outre les pressions exercées pour étouffer ce scandale qui discrédite pour de bon le passeport diplomatique sénégalais, des députés cités comme responsables de ce trafic, menacent de déballer s’ils sont lâchés par leur groupe parlementaire. Du rififi en l’air !

Au vu des faits extrêmement graves révélés par la presse et sous tendus par l’audition d’une pièce essentielle (Elhadji Diadji Condé) et du témoignage des victimes ou plutôt des bénéficiaires des passeports diplomatiques effectués par les limiers de la division des investigations criminelles depuis plusieurs semaines déjà, serait-il crédible pour Dame Justice de se détourner de cette rocambolesque affaire ? La question mérite son pesant d’or car malgré les assurances de Aymerou Gningue le président du Groupe parlementaire de la majorité qui répète sans cesse « Personne ne sera protégé », tout concourt actuellement à une volonté d’étouffer dans l’œuf ce qui apparaît comme le summum des scandales au sein de l’hémicycle.

Selon des sources proches de l’enquête, « C’est depuis le mois de juillet qu’un agent de liaison d’une ambassade européenne basée à Dakar nous a rencardé sur l’éventualité d’un trafic de passeports diplomatiques qui a cours au sein de l’assemblée nationale. Notre source nous avait remis des copies de passeports diplomatiques qui après vérification, ont permis de mettre les éléments de recherches en branle ». « Mais c’est la plainte de la Oumou T. qui nous permettra d’avoir un début de piste », confie cette source. Et dans ce travail de fourmi, la DIC mettra à contribution le Commissariat Spécial de l’aéroport AIBD qui mettra rapidement une souricière pour les détenteurs de passeports diplomatiques émis pour le compte de l’assemblée nationale.

 « Boubacar Biaye ne sera l’agneau sacrifice de personne, si cette fraude a pu perdurer aussi longtemps c’est parce qu’il dispose de soutiens solides. Et d’ailleurs, pourquoi l’avoir choisi comme président du Groupe d’amitié France/Sénégal, l’un des groupes les plus convoités? », s’interroge Kéba Daffé l’un des proches du député Boubacar Biaye 

« Très rapidement, la police de l’Air et des Frontières de l’aéroport transmettront d’importantes données des différents passages des titulaires de passeports diplomatiques dont bizarrement la plupart avaient la même durée de validité. », confie notre source. Et ce dernier de nous apprendre « Les copies ont été envoyés pour authentification au ministère des affaires étrangères et bizarrement, tous les documents ont été bel et bien délivrés par ce ministère. Passée sous le feu roulant des questions , la plaignante se mettra à table en donnant les renseignements nécessaires qui ont permis de remonter toute la filière. Le Procureur avisé, a donné sa bénédiction.

Pour les proches de Boubacar Biaye, certains cherchent à faire payer le député de Sedhiou. « Comment un document qui offre une légitimité officielle peut-il être obtenu aussi facilement par un député s’il ne bénéficie pas de complicités internes comme externes à l’assemblée? » s’interroge Kéba Daffé pour qui, « Ce document a une légitimité officielle car sur le passeport diplomatique, est écrite une phrase solennelle du ministère des Affaires étrangères qui prie les autorités des pays alliés du Sénégal de laisser passer librement le titulaire du passeport et de lui donner aide et protection. Ce qui en soit une véritable responsabilité ».

« Quand Diadji Condé a été arrêté, il m’a envoyé un proche pour me dire de ne citer personne car on lui avait donné la garantie que tout serait réglé comme l’affaire Boughazeli. Mais au rythme où vont les choses, je crois que je serais l’agneau du sacrifice », nous confie un des députés cités dans le scandale qui reconnaît avoir sollicité les services du « cerveau »

Vu la gravité des faits, c’est l’Omerta au sein de l’assemblée nationale. Même les députés de l’opposition approchés refusent d’en parler et disent ne pas vouloir s’immiscer dans une affaire pendante devant la justice. Ce trafic qui dure depuis 2013 , concernerait plusieurs députés et fonctionnaires des Affaires Étrangères, selon les éléments d’enquête de la DIC. 

« C’est l’une des présumées victimes qui m’a informé en premier de la procédure déclenchée et de l’arrestation de Diadji Condé », confie le député qui déclare que cette dernière lui a appris que Diadji a dit aux enquêteurs qu’il ne pouvait donner les noms des autres complices qui ont tous bénéficié de cette manne financière mais de titres pour faire voyager leurs proches. « Nous avions tous la garantie qu’il n’y avait pas de quoi s’inquiéter car tout était verrouillé mais, si sanction il y’a, nous sommes plusieurs à utiliser les services de Elhadji Diadji Condé pour le trafic de visas, de passeports diplomatiques et autres que je me réserve le droit de rendre public si on veut tout mettre sur mon dos »

D’ailleurs, poursuit « l’avocat » du député Boubacar Biaye, « Le passeport diplomatique est un document de voyage qui facilite les conditions de déplacements de leur titulaire pour se rendre dans certains pays et y exercer leur mission » et, « Ont droit à ce document les agents diplomatiques et consulaires, ainsi que le Président de la République, le Premier ministre, le président du CESE, le président de l’Assemblée nationale et les membres du gouvernement pour la durée de leurs fonctions, assure l’arrêté du 11 février 2009, relatif au passeport diplomatique ».

« Elhadji Diadji Condé, un Vrp de l’hôtel des députés. Plusieurs parlementaires mettaient leur clé de chambre à sa disposition », renseigne un responsable de la sécurité de l’édifice qui révèle que presque tous les occupants de l’hôtel ont des courtiers en tout genre 

Si la clameur publique a les yeux rivés sur les députés Mamadou Sall et Boubacar Biaye, il en est autrement pour certains membres du personnel de l’hôtel des députés où se déroulaient quasiment toutes les transactions. « La première fois que j’ai noté la présence du sieur Diadji Condé, c’était vers la fin de l’année 2013. Je ne me rappelle pas du jour mais il était accompagné d’un haut fonctionnaire devenu depuis directeur dans un ministère bien connu », nous apprend l’un des responsables en charge de la sécurité de l’hôtel des députés.

« Quand il venait par la suite, Diadji était soit devancé par le haut fonctionnaire en question ou il l’attendait dans l’une des sept chambres dont il détenait la clé. Il était très aimable et la dernière fête de Tabaski, il m’a offert le prix d’un mouton », affirme notre interlocuteur. D’ailleurs, ce dernier s’étonne qu’on ne cite que les deux députés « Si Diadji Condé entretenait des affaires louches avec Boubacar Biaye et Mamadou Sall, cela voudrait quille faisait également avec les occupants des sept chambres car, à maintes reprises je l’ai vu remettre de grosses enveloppes ».

Pape SANÉ 

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