jeudi, 2 mai 2024 14:06

Sénégal : Des journalistes emprisonnés ou menacés, des signaux coupés, la presse est-elle bâillonnée ?

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Sénégal
Atlanticactu / Dakar / Cheikh Saadbou Diarra
Plusieurs journalistes, des organes de presse et des voix audibles sont dans le viseur du pouvoir depuis la réélection en 2019 du président Macky Sall pour son dernier mandat. Les choses ont pris des proportions inquiétantes quand la question du troisième mandat illégal a été soulevé mais surtout, quand des manœuvres flagrantes sont mises en branle pour stopper l’ascension du principal opposant au pouvoir. Aujourd’hui, il est important de dénoncer le recours abusif à la justice, détournée afin de faire obstacle au débat public.
Des journalistes critiques vis-à-vis du régime sont arrêtés, des signaux de télévision suspendus au point que pour certains observateurs, la liberté de la presse est dangereusement menacée ces derniers mois dans le pays. Mais, même bâillonnée, la presse libre ne baisse jamais la garde !
Le Classement mondial de la liberté de la presse de l’ONG Reporters sans frontières (RSF), révélé chaque année à l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, célébrée le 3 mai, place notre pays à la 104e position en 2023, alors qu’en 2022, il occupait la 73e place.
L a chaîne de télévision Walf TV n’émet plus sur la Télévision numérique terrestre (TNT depuis le 1er juin dernier, y compris désormais sur les autres bouquets. Son signal a été suspendu par les autorités, pour 30 jours. Dans un communiqué rendu public le 9 juin dernier, le ministère de la Communication, des Télécommunications et de l’Economie numérique lui reproche la «diffusion en boucle des images de violence exposant des adolescents».
La même source ajoute que «ces images sont accompagnées de propos subversifs, haineux, dangereux incitant à la violence et portant manifestement atteinte à la sécurité de l’Etat, à l’intégrité territoriale, à la stabilité et à la paix sociale, en violation flagrante de toutes ses obligations»
En conférence de presse, vendredi dernier, le Directeur général du Groupe Walfadjri, qui annonce la réception de la notification de la suspension du signal de la télévision Walf TV le même jour, a dénoncé les agissements du gouvernement contre leur organe de presse.
«Il n’y aura pas demi-mesure. Vous dites que Walf est partisan. J’accepte. Vous dites que Walf est pro Sonko. J’accepte. Vu que vous nous combattez, on va vous combattre. Nous appelons à une marche vers le Palais», a laissé entendre Cheikh Niasse.
Et ce n’est pas la première fois que le signal de Walf TV est coupé. L’une des dernières mesures dans ce sens remonte au mois de février dernier. Walf TV avait été frappée par la mesure, après la retransmission en direct des heurts entre policiers et manifestants à Mbacké lors d’un meeting interdit du parti Pastef. Et cette décision émanait du Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA).
Comme chacune des décisions antérieures dans ce sens, les acteurs des médias n’ont pas apprécié la suspension du signal de Walf TV. En effet, le Conseil des diffuseurs et éditeurs de presse au Sénégal (CDEPS) dénonce un «abus de pouvoir» et une atteinte grave à la liberté de la presse.
Seulement, Walf TV est loin d’être le seul média à être frappé par cette mesure excessive. Au contraire, depuis quelques mois, la suspension de signaux de télévision fait rage au Sénégal. La Sen TV et Zik FM ont également fait partie des victimes. Le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA) avait suspendu leurs signaux suite à la poursuite d’animation de la revue de presse par Ahmet Aïdara, alors qu’il était candidat à la mairie de ville de Guédiawaye.
Parmi les faits qui menacent la liberté de la presse au Sénégal, il y a l’emprisonnement du journaliste de Walfadjri, Pape Ndiaye, depuis le 7 mars dernier. Il a été inculpé pour «outrage à magistrat» et «diffusion de fausses nouvelles». Il avait affirmé, dans une émission télévisée, que les «19 Substituts du Procureur s’étaient opposés au renvoi du dossier Sweet Beauty devant la Chambre criminelle».
Un autre journaliste croupit encore en prison. Il s’agit de Serigne Saliou Guèye, Directeur de publication du quotidien «Yoor Yoor». Il est poursuivi pour «publication d’écrits de nature à jeter le discrédit sur les actes ou décisions juridictionnels, diffusion de fausses nouvelles de nature à jeter le discrédit sur les institutions publiques et usurpation de la fonction de journaliste».
Auparavant, c’est le journaliste Pape Alé Niang qui était dans les liens de détention. Il était accusé d’avoir divulgué des informations secrètes autour d’une inculpation présumée de viol à l’endroit d’Ousmane Sonko.
Toutes ces arrestations, non exhaustives de la situation générale, continuent de susciter une vague de critiques de la presse et de la société civile. Pis, elles ternissent l’image du Sénégal et jouent sur le classement mondial de la liberté de presse révélée chaque année à l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de presse, le 3 mai. Classé 73e dans en 2022, le Sénégal se retrouve à la 104e position en 2023. Il perd ainsi 31 places.

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