vendredi, 5 juillet 2024 00:02

Refus de visas : Les africains « offrent » annuellement près de 100 milliards de francs CFA à l’UE

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Afrique
Atlanticactu / Dakar / Abidjan / Bruxelles / Cheikh Saadbou Diarra
En tentant de manière régulière de rejoindre l’Europe, les africains dont les demandes de visas dans les ambassades des pays de l’Union européenne membres de l’espace Schengen, ont été rejetées, ont perdu près d’une centaine de milliards de francs CFA soit 56 millions d’euros, en 2023. Une manne financière qui grossit annuellement mais qui est difficile à justifier. Au même moment, des pays comme le Senegal refuse d’appliquer la réciprocité des visas avec la France et les pays de l’UE.
Au moment où l’Europe rend les conditions d’obtention d’un visa Schengen de plus en plus drastiques, où les refus de visas s’empilent, une injustice saute aux yeux. Si le visa est refusé, la somme versée pour sa demande est conservée. Une sorte de double peine. Et les sommes ne sont pas minimes.
En 2023, les ressortissants africains ont ainsi reçu 704 000 réponses négatives à leurs demandes de visa. Ce qui représente 56,3 millions d’euros payés en pure perte. Une somme qui va encore gonfler. Désormais, depuis le 11 juin, il faut débourser 10 euros de plus, soit 90 euros, pour faire une demande de visa court séjour pour rejoindre l’espace Schengen. En plus de déposer la plupart des demandes de visa, les ressortissants du continent africain sont également les demandeurs les plus rejetés. En 2023, les pays africains et asiatiques ont supporté 90 % des coûts des visas Schengen refusés évalués à 130 millions d’euros, selon une étude de EU Observer.
Algériens et Marocains les plus grands perdants. Les sénégalais ont déposé près de 2 milliards de francs dans l’économie européenne 
Les demandeurs algériens ont payé le plus lourd tribut des refus de visa dans l’espace Schengen en 2023. Ils ont versé plus de 13 millions d’euros en pure perte pour 166 200 demandes rejetées. Ainsi, sur les 474 032 demandes déposées par les Algériens, 35 % ont été écartées. Au niveau individuel, le montant de la demande de visa à 80 euros représente plus du tiers du salaire moyen algérien.
En seconde position, les Marocains qui ont appliqué la réciprocité du visa, ont essuyé plus de 136.300 refus de visa et ont versé inutilement près de 11 millions d’euros.
Viennent ensuite, les Égyptiens (3,7 millions d’euros), les Nigérians (3,4 millions d’euros) et les Tunisiens (3,1 millions d’euros). Au 6e rang du nombre de demandes refusées, les Sénégalais ont déboursé 2,11 millions d’euros pour ne pas avoir de visa. Au total, ces 56 millions perdus par les Africains en visas refusés représentent 43 % des sommes perdues par les ressortissants non européens, dont le visa Scheng a été refusé.
À quoi sert cette manne financière à l’Union européenne ?
Ces sommes dépensées à fonds perdu par les Africains sont considérées comme des « transferts de fonds inversés » ne bénéficiant qu’aux pays de l’Union européenne (UE). « L’inégalité des visas a des conséquences très tangibles et les plus pauvres du monde en paient le prix », constate Marta Foresti, fondatrice du collectif LAGO, auprès de UE Observer. « Nous n’entendons jamais parler de ces coûts lorsqu’on parle d’aide ou de migration, il est temps de changer cela », poursuit-elle.
Régulièrement, les associations de la société civile se mobilisent. En 2022, dans une lettre adressée à l’ambassadrice de France à Rabat, Hélène Le Gal, la Fédération marocaine des droits du consommateur (FMDC) réclamait la restitution des frais des visas non délivrés par les consulats de France.
Une demande restée lettre morte. La même année, des organisations des deux rives de la Méditerranée avaient dénoncé, dans un appel commun, « la politique des visas : discriminatoire et injuste » et des procédures « extrêmement coûteuses et sans remboursement en cas de refus »
Plus l’Europe se barricade à travers Frontex, plus les visas plus chers…
De son côté, l’Union européenne ne s’étend pas trop sur le sujet. « Les revenus supplémentaires générés par les demandes de visa seront réinvestis pour mettre à disposition davantage de ressources – y compris du personnel – pour le traitement des demandes de visa, assure la Commission. Cela devrait permettre de réduire le temps d’attente pour les rendez-vous pour un visa Schengen, car les consulats seraient en mesure de traiter davantage de demandes », explique le site d’actualité InfoMigrants.
Ces sommes pourraient être encore plus élevées l’an prochain avec une facturation du visa qui passe de 80 à 90 euros. La Commission européenne a imputé cette hausse à l’inflation dans les États membres et assure que les frais sont encore « relativement bas » par rapport à d’autres pays. À titre de comparaison, un visa pour le Royaume-Uni s’élève par exemple à 134 euros et 185 euros pour les États-Unis.

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