vendredi, 22 novembre 2024 05:01

Nouveaux scandales chez Facebook, Amazon ou Apple sur l’utilisation des données privées : les gouvernements bientôt obligés d’intervenir pour protéger la démocratie ?

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Facebook a été confondu une fois de plus, la semaine dernière, d’utilisation frauduleuse de données personnelles. Cette fois-ci, il ne s’agit plus seulement des données personnelles fournies de lui-même par l’utilisateur sur la toile, mais des conversations les plus intimes échangées par messagerie. Le téléphone ou l’enceinte connectée peuvent se révéler de véritables espions.

C’est Bloomberg qui a révélé que Facebook avait commandé l’écoute et la retranscription de conversations d’utilisateurs de Messenger par des sous-traitants. Alors, en pleines vacances d’été des médias, l’information n’a pas entrainé beaucoup de commentaires, sauf que les milieux d’affaires, gros clients annonceurs sur Facebook, s’en sont émus une fois de plus. D’autant que les semaines précédentes, Amazon, Google et Apple ont aussi été accusés d’avoir, sans autorisation, utilisé et écouté des conversations privées. Très précisément des employés d’Amazon auraient espionné les utilisateurs de l’enceinte connectée Echo, ceux d’Apple par le biais de l’assistant vocal Siri.

L’affaire Facebook éclatée au grand jour, l’entreprise a immédiatement reconnu ses torts en promettant que la pratique était désormais révolue depuis une semaine. Alors qu’elle durait depuis 2015.

Les raisons invoquées à de tels agissements ne convainquent personne. « Il s’agit, dit Facebook, de processus de vérification pour savoir si l’intelligence artificielle est capable de répondre correctement ». Bref, il s’agissait d’améliorer ses services.

Officieusement, cela va plus loin. Parce qu’il y a bien dissimulation. Pendant son audition devant le Congrès en avril 2018, le timide Mark Zuckerberg avait rejeté l’idée d’enregistrements audio. « Nous ne faisons pas ça », avait-il répliqué fermement. « Vous parlez d’une théorie du complot qui circule affirmant que nous écoutons ce qui se passe dans votre micro et que nous l’utilisons pour de la pub » s’était défendu le dirigeant.

Et pourtant, en évoquant la publicité, on est précisément au cœur du fonctionnement de l’économie numérique et de celui des GAFA, qui ont besoin de passer par ce genre de pratiques pour faire fonctionner leur modèle économique et assurer leur prospérité. Il y a peu de solutions pour réguler ces pratiques.

1e point, il faut comprendre que le business model des GAFA est indissociable du commerce des données privées pour engendrer de la publicité. Leur concurrence les emmène sur des terrains glissants. Les enregistrements sonores constituent évidemment une mine d’or sans précédent pour les entreprises, bien plus que les données remplies dans des formulaires.

La collecte de l’information vocale n’a qu’un but : proposer de la publicité. C’est le modèle économique de Facebook et celui des Gafam. La publicité ciblée, c’est le nerf de la guerre. « La valeur d’une publicité dépend de deux paramètres : le nombre de personnes touchées et la précision du ciblage » explique Olivier Babeau, économiste.

2e point, les solutions pour faire face à cette recherche d’impérialisme ne sont pas satisfaisantes à l’heure actuelle. Doit-on laisser l’utilisateur seul dans cette jungle, réguler ou démanteler ? Le consentement de l’utilisateur est bien souvent avancé pour résoudre le problème. Mais le consommateur peut-il saisir l’ampleur de ce à quoi sa donnée sera destinée ? Qui lit les conditions que l’on nous demande de cocher à l’entrée de chaque site ?

L’Etat est une autre solution fréquemment avancée pour réguler ces nouvelles entreprises. Mais les Etats ne sont-ils pas devenus eux-mêmes des concurrents des GAFA, qui se mettent à battre monnaie (le Libra de Facebook) et qui ont un champ d’utilisateurs bien plus vaste que n’importe quel Etat (on parle en milliards).

3e point : Si les gouvernements, déjà impuissants à appliquer des fiscalités convenables au niveau de l’activité, ne peuvent pas intervenir dans le contrôle des données personnelles dont on sent bien qu‘elles attentent à la liberté personnelle et que ces pratiques représentent un danger dans le fonctionnement de la démocratie, malgré les gains de confort ou de productivité que la technologie procure, il ne reste que deux solutions :

D’une part attendre que les GAFA s’entretuent. Toutes ces entreprises sont en concurrence frontale pour la captation de ces données, pour leur utilisation et leur exploitation auprès des annonceurs. « Elles sont toutes lancées dans une course frénétique pour devenir autant que possible à la fois un monopole et un monopsone. Autrement dit pour rester à terme à la fois l’unique fournisseur de biens et services aux consommateurs et un acheteur incontournable des biens et services des entreprises » continue Olivier Babeau. Cette compétition est donc une compétition meurtrière entre les GAFA, pour qu’il n’en reste qu’un, à moins qu‘elles ne réussissent à créer un oligopole, qui n’est rien d’autre qu’un monopole géré par plusieurs acteurs.

D’autre part, on peut suggérer des mesures juridiques de démantèlement pour abus de position dominante. Facebook pourrait évidemment en faire les frais la première. Compte tenu de son pouvoir et de ses maladresses. Mais si la pyramide Facebook commence à s’effriter, les autres pourraient être entrainées et tomber rapidement. On imagine mal un démantèlement qui ne soit pas systémique. Cela dit, comment imaginer que le gouvernement américain en vienne à cet extrême ? Il a besoin des GAFA, pour des raisons de politique intérieure, pour des raisons de financement de la recherche. Enfin, pour des raisons extérieures, le digital américain est le seul capable de faire face à la puissance du digital chinois. Pas question de l’affaiblir. La raison d’Etat vaudrait bien qu’on prenne quelques risques avec la liberté individuelle.

Source Atlantico

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