Au moment du Brexit sur le continent européen, au moment de la sortie du multilatéralisme par les Etats-Unis, au moment où la Chine se coupe du monde pour cause de virus, l’Afrique, elle, avance dans le sens inverse. C’est un paradoxe qui mérite je crois d’être souligné.
L’Union africaine a profité de son sommet annuel pour désigner un secrétaire général à la nouvelle zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) et préciser son calendrier : elle sera opérationnelle en juillet. Après un départ prudent, elle compte à présent quasiment tous les pays du continent africain. Lundi à Addis Abeba, les pays africains ont franchi une étape pour installer un marché commun, unique, sans barrière douanière sur 90% des produits entre la plupart d’entre eux. Ils ont concrètement désigné un secrétaire général pour la Zone de libre-échange continentale, la Zleca.
C’est un vieux projet mais qui cette fois a un vrai goût du neuf. Dans le même temps, une dizaine de pays de l’Ouest-africain travaillent à une monnaie unique, l’eco, qui remplacera entre autres le franc CFA.
Cet eco devait entrer en vigueur en juillet, hier le Nigéria a demandé un report, mais clairement les initiatives se multiplient pour renforcer les liens au sein du continent.
Où en est l’économie ?
L’Afrique souffre à la fois d’une grande hétérogénéité (mais bon cela n’est spécifique : en Europe, le Danemark n’est pas la Roumanie), d’une démographie parfois encore galopante, de conflits armés et d’espoirs déçus.
Une facilité conduirait à reproduire le mot du Général De Gaulle à propos du Brésil : pays d’avenir et qui va le rester. Mais en réalité, depuis vingt ans, le PIB africain affiche le deuxième taux de croissance du monde, 4,6% par an en moyenne.
Deux fois moins que l’Asie, mais bien plus que l’Amérique du Sud. Six pays africains sont parmi les dix les plus en croissance au monde :
Rwanda,
Éthiopie,
Côte d’Ivoire,
Ghana,
Tanzanie
Bénin.
Bref, il y a des ambitions nouvelles, un dynamisme entrepreneurial et de l’épargne, comme l’a constaté une réunion organisée hier à Paris par l’OCDE et le Cercle des économistes.
Doper le commerce intra-africain
A terme, la Zleca devrait couvrir un marché de 1,2 milliard de personnes, représentant un PIB de 2.500 milliards de dollars. Selon la Commission économique pour l’Afrique (CEA), l’objectif premier de ce projet est de doper le commerce intra-africain . De 15 % actuellement, il devrait grimper à plus de 50 %. Pour y parvenir, cela suppose un changement radical des modèles économiques. Actuellement, l’Afrique exporte surtout des matières premières brutes. Pour intensifier les échanges intra-régionaux, il faut transformer les produits sur place avant de profiter de l’abaissement des barrières douanières à l’intérieur de la zone de libre-échange, prévue pour 2022 et de développer les échanges sur le continent. Selon les projections, l’Afrique comptera 2,5 milliards de personnes à l’horizon 2050 et verra son économie croître deux fois plus rapidement que celle des pays développés .