Parler du leadership reconnu du Président Macky Sall est la nouvelle trouvaille de M. Alioune Tine. Des propos qui ne devraient être une surprise pour aucun Sénégalais car l’ancien dirigeant de la Raddho était de la délégation qui accompagnait le chef de l’Etat à Bamako pour les besoins de la médiation entre IBK et une partie de son opposition réunie autour du M5/RFP. De ce que l’on sait de la situation au Mali, aucun des cinq chefs d’Etat de l’espace CEDEAO présents n’avait réussi à taper dans l’œil des contestataires. M. Tine parle alors de quel leadership…. et certainement éclairé? Aller à Bamako en de pareilles circonstances sans rencontrer Barou Rouamba mon à quel point ce soi-disant leadership est à relativiser. Cet ancien fonctionnaire des Impôts a été la cheville ouvrière de l’unité entre l’armée et la centrale syndicale qui avait conduit à la grève générale débouchant sur l’arrestation du Général Moussa Traoré le 26 Mars 1991. Mieux, Barou a toujours chuchoté à l’oreille de tous ceux qui se sont opposés au diktat des différents pouvoirs maliens. De Tiécoro Bagayoko à Bakary Karembé en passant par Amadou Toumani Touré (ATT).
M. Alioune Tine, pour un rappel historique, sachez que la structuration politique du Mali est très différente de celle du Sénégal où des personnes peuvent au « nom du peuple » « diriger » des combats pour négocier par la suite des strapontins. Ce n’est pas le cas de figure dans cette République sœur ayant le même emblème que nous. Au Mali, les citoyens se lèvent d’abord et ensuite, seulement ensuite suivent les acteurs politiques et de la Société Civile. Moi pour commencer et les Sénégalais, aimerions que vous nous expliquiez en quoi le « leadership de Macky Sall est reconnu…. ». Il faudra fouiller l’histoire des coups d’Etat et coups d’éclat dans ce pays. Vous comprendrez qu’aucun acteur fusse-t-il l’imam Dicko n’oserait franchir le rubicond et négocier hors du champ établi, c’est à dire la démission de IBK. On aurait créé le poste de vice-président pour lui ou pour l’un des leaders historiques du mouvement du 5 juin avec des prérogatives supérieures ou égales à celles du président de la République, on aurait donné tous les portefeuilles ministériels, les directions générales et nationales de sociétés publiques, etc … à l’opposition ; cela n’aurait pesé sur la balance de la volonté populaire.
« Même ATT pourtant « issu » de ce peuple qui l’a projeté au devant de la scène en mars 1991 n’a pu tenir tête face à la déferlante des « hommes de Kati » d’en 2012. Le Capitaine Amadou Haya Sanogo et ses camarades putschistes avaient misé sur l’importance de l’appartenance nationale des maliens pour débarquer l’icône flétrie de 1991 »
Pour cela M. Tine, sachez que les «23 juin» sont devenus une banalité au Mali depuis la chute de Modibo Keïta. Ce coup d’État était mené par des membres des forces armées maliennes le 19 novembre 1968 contre le gouvernement du Président Modibo Keïta. Le coup d’État, qui ne fera pas de victimes pendant son déroulement, était dirigé par le lieutenant Moussa Traoré et d’autres officiers subalternes maliens, en particulier les lieutenants Tiécoro Bagayoko, Kissima Doukara, Youssouf Traoré et Filifing Sissoko, et des Sous-officiers tels que l’adjudant-chef Soungalo Samake. Comme avec ce qui se passe actuellement, les militaires exigeaient juste de nouvelles élections ou le changement de certaines têtes politiques connues pour faire face à la prévarication des deniers publics. D’ailleurs, le capitaine Abdoulaye Ouologuem, conducteur de la voiture présidentielle témoigne en ces termes, « les mutins ne faisaient que réclamer de nouvelles élections, ce que le président Modibo Keïta avait refusé ». Devant ce refus, l’armée diffuse un message radio annonçant que « le régime dictatorial […] est tombé ». Moussa Traoré devient Président du comité, promettant démocratie et élections libres, qui n’arriveront pas. Il est finalement proclamé président de la République en 1969 et dirige le pays jusqu’à sa destitution lors du coup d’Etat de 1991, minutieusement préparé par un fonctionnaire des Impôts, Oumar Rouamba dit Barou.
M. Tine, ce nom a son importance pour tous les dirigeants maliens mais également pour le Président Macky Sall. Lorsqu’en 1991, las d’attendre les promesses faites en 1968 par le lieutenant Moussa Traoré devenu Général, des civils ont convaincu de jeunes officiers de changer les choses pour éviter le pire au Mali qui tanguait dangereusement vers le sécessionnisme du fait de la forte corruption dans l’armée et la régénération des mouvements de l’Azawad sévèrement réprimés et mis sous l’éteignoir durant le magistère de Modibo Keïta.
Pour rappel M. Tine, Ce Barou Rouamba qui en son temps avait réussi la jonction entre l’armée et le mouvement démocratique, était parti pour être un des membres du CTSP, à la demande de Bakary Karembé. Mais croyant bien faire, il (Barou), s’en est ouvert à son ami ATT qui, après la chute de Moussa et à l’occasion de la constitution du CTSP, fusion du CMRN- Mouvement Démocratique, l’en dissuada, arguant des commentaires de la rue, sur leur amitié connue. A la publication de la liste, Bakary Karembé, le vice- président du CTSP ne voyant pas le nom de Barou Rouamba, en raison du rôle éminemment important qu’il a joué dans la chute de Moussa, a failli tomber à la renverse et lorsque, Barou lui expliqua les raisons de sa non figuration sur la liste, le vieux lui répondra en ces termes « Barou, tu regretteras ça toute ta vie». Bakary Karembé de rappeler également, « Un jour bien avant le coup d’état, Barou m’avait parlé d’un certain Amadou Toumani Touré(ATT), pour l’informer que « nous allons nous battre et nous allons, lui-même, le terrasser en tant que militaire s’il trahissait notre secret ». Et c’est ainsi que j’ai compris que les militaires préparaient aussi quelque chose, mais qu’ils n’avaient pas le courage de passer à l’action. (…) Là où nous avons su véritablement que ça allait marcher, c’est lorsqu’une nuit, à minuit, en quittant le bureau pour rentrer chez moi ce soir du 25 mars 1991, j’ai trouvé Barou qui m’attendait. Il m’a juste dit « Koro, c’est ok pour demain, j’enverrai des gens te chercher pour te mettre à l’abri car comme tu l’as pressenti, il y aura beaucoup de trahison de la part des militaires ».
« Même si nul n’est prophète chez soi, comment peut-on parler sans gêne d’un leadership de Macky Sall au Mali ? Une initiative personnelle du président sénégalais aurait été un plus sérieux baromètre de mesure qu’une délégation de chefs d’état quasiment tous contestés chez eux. »
Juste un rappel pour permettre aux lecteurs de comprendre Pour il n’y a eu aucun leadership de Macky Sall au Mali. Quand l’ancien président de l’assemblée nationale faisait l’objet d’une mise en accusation par ses pairs du PDS, s’il y’a eu des sauveurs au Sénégal, il y en a eu ailleurs notamment au Mali. Ce Barou Rouamba est de ceux-là qui ont réussi à sauver l’actuel chef de l’Etat.
Quand en 2008, le Président Wade avait fait demandé l’ouverture d’une enquête pour blanchiment de capitaux, faux et usage de faux contre celui qui a été successivement ministre des Mines,ministre de l’intérieur, directeur de campagne, premier Ministre et Président de l’Assemblée Nationale, Macky Sall était devenu infréquentable au Sénégal car ayant commis le crime lèse-majesté en voulant convoquer le tout puissant fils de son mentor de président devant la représentation nationale, ailleurs des forces s’organiser pour lui éviter le pire. Cela est tellement vrai qu’on peut encore entendre les propos de Mamadou Seck, son successeur au perchoir de l’Assemblée nationale. Une déclaration incendiaire de Mamadou Seck qui disait que « Macky Sall s’est tiré une balle dans la tête en tentant de sauver sa peau à la tête de l’Assemblée nationale ». Et le natif de Mbao de continuer « C’est plutôt son comportement de poltron qui a conduit à sa défenestration du perchoir de l’Assemblée nationale ». Pour Mamadou Seck, «Macky Sall a cherché trop à sauver sa peau. S’il avait fait ce qu’il avait à faire, il ne serait jamais dans cette situation».
De ceux-là qui avaient soutenu Macky Sall pour l’extirper des griffes de Me Abdoulaye Wade, le président A.T.T. s’était beaucoup impliqué dans la question jusqu’au jour où un rapport des services secrets lui avait signifié la présence dans les bagages de M. Macky Sall d’un encombrant « ex officier » Bissau guinéen qui n’avait pas bonne presse au niveau des palais de la sous-région, Umaru Embalo Cissokho pour ne pas le nommer.
Mais l’un des véritables artisans du combat de l’actuel couple présidentiel sénégalais aura été sans nul doute Barou Rouamba. Il aura pesé de tout son poids sur ATT pour alors président de la république pour convaincre son homologue Abdoulaye Wade d’enterrer la hache de guette contre son « fils excommunié ». Seuls les initiés savent !!!