C’est un véritable coup de massue que le Pr Pape Touré vient d’asséner sur la tête du président de la république et du ministre de la Santé en annonçant sa démission de la présidence du conseil d’administration de l’hôpital Dalal Jamm. En effet, au moment où nos structures de santé souffrent gravement de manque de matériel et de personnel, l’Etat via son chef suprême, le président de la République, décide d’orienter sa subvention vers d’autres projets inopportuns. C’est le cas, par exemple du Centre hospitalier national Dalal Jamm d’où l’ire du PCA qui a décidé de démissionner.
Alors que le Président Macky Sall a réitéré sa préoccupation face à la pandémie de coronavirus qui poursuit sa propagation à travers le pays au point d’obliger les autorités à réajuster le plan de lutte, la démission du Pr Pape Touré dont la structure était érigée en centre de traitement référencée , va susciter la curiosité des populations à s’interroger si vraiment le gouvernement est sérieux dans le cadre de cette lutte.
Dans sa lettre, Le Président du Conseil d’Administration du Centre hospitalier national Dalal Jamm, le Professeur Papa Touré explique à Macky Sall que le Centre hospitalier national Dalal Jamm ouvert depuis maintenant cinq ans et destiné à être un des fleurons de notre système de santé hospitalier fonctionne encore comme un centre de santé. En effet, explique-t-il, les structures essentielles de son plateau technique à savoir les laboratoires, l’imagerie médicale, la réanimation, les blocs opératoires, les services d’urgence… ne sont toujours pas fonctionnelles.
« La mise en service de ce plateau technique fait partie de vos priorités et une subvention d’environ deux milliards et demi est toujours attendue de l’Etat… C’est devant une telle situation que nous apprenons que votre décision d’accorder à l’hôpital Dalal Jamm une subvention d’un milliard et demi de francs Cfa pour la construction de deux bâtiments destinés à abriter un centre de greffe de moelle et un centre de procréation médicalement assistée », explique-t-il.
Poursuivant, le Pr Touré explique qu’une telle décision que – je ne saurais défendre – ne répond ni aux besoins immédiats de cet hôpital, ni à l’urgence qu’impose la pandémie de Covid-19 ni à nos impératifs de santé publique.
Pour le président du Comité national d’éthique pour la recherche en santé (Cners), notre pays est allé trop vite en besogne car beaucoup de préalables ne sont pas encore vidées sur cette question fondamentale. Le Professeur Pape Touré n’est pas du tout rassuré par l’autorisation de greffe d’organes au Sénégal.
« Dans ces conditions, je vous demande Monsieur le Président de la République de bien vouloir me décharger de mes fonctions de PCA de l’hôpital Dalal Jamm. En vous remerciant de votre confiance, je vous prie de croire, monsieur le Président de la République à l’expression de mes sentiments respectueux et dévoués. », termine-t-il.
Il y’a quelques mois à peine, à l’occasion du Sommet mondial des Comités nationaux d’éthique et de bioéthique, le Pr Pape Touré pendant le contrepied du ministre Abdoulaye Diouf Sarr, avait précisé, «Pour ce qui est du Sénégal, nous avons l’éthique des catastrophes, la Procréation médicalement assistée, la greffe d’organes, etc. Et je dois dire que très bientôt le Sénégal sera en mesure de faire des greffes d’organes parce que le législateur a légiféré. Mais, est-ce que aujourd’hui, le Sénégalais est prêt à la greffe d’organe ? Est-il prêt à les donner ? Est-il prêt à recevoir des organes ? Et ce débat, il faut nécessairement qu’il ait lieu ».
Mais pour le ministre de la santé, Abdoulaye Diouf Sarr, un dispositif de transition, d’anticipation et d’accompagnement, et les comités nationaux d’éthique et de bioéthique peuvent jouer ce rôle »,
Face à ce que le Scientifique considère comme une précipitation non justifiée au moment où les urgences de santé publique étaient ailleurs, l’homme connu pour son franc parler et sa liberté d’action a préféré tout bonnement démissionner pour se consacrer à ses recherches.
Cheikh Saadbou Diarra (Atlanticactu.com)