vendredi, 29 mars 2024 08:49

L’IMPACT DU PORT SECONDAIRE SUR LA FLUIDITE DU TRAFIC MARITIME : « Les géants de mer ont besoin de feeders pour la desserte de l’hinterland »

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Le commandant Lassana, ex DG de la marine marchande Ivoirienne, faisait  l’éloge des transports maritimes en ces termes : « Quand on remonte dans l’histoire de l’humanité, on constate que toutes les grandes nations sont devenues ce qu’elles sont grâce à la mer. La mer est importante pour le développement des nations jeunes. Puisque 90% des échanges sont assurés par mer ».

La compétitivité d’un port dépend de sa capacité d’accueil qui se résume par un linéaire de quai et un tirant d’eau importants.

C’est dans cette perspective que le PAD(Port Autonome de Dakar) a lancé un emprunt obligataire par appel public à l’épargne de 60 milliards sur le marché financier de l’UEMOA avec un taux d’intérêt de 6,6% afin de destiner les ressources collectées au financement des infrastructures terrestres du port de Ndayane.

Ce port futur ou port de Dakar à Ndayane, une partie intégrante du PSE constituerait une réponse à la place du port de Dakar dans la zone ouest- Africaine et concurrencé par les ports d’Abidjan et de Lomé.

Ces deux ports précités ne disposent pas de linéaires de quai aussi importants que celui du port de Dakar, abritent des profondeurs de quai qui sont largement plus compétitifs que celui de Dakar (respectivement 18m et 16m).

Avec la construction de ce hub avec une profondeur de quai de 18 à 20m et qui constituera un prolongement du port de Dakar, les ports secondaires seront bien servis pour pouvoir desservir davantage l’hinterland.

Les grandes lignes régulières avec les TGN de dernière génération pourront fréquenter le Port de Dakar.

Les ressources mobilisées pourront servir à relancer le trafic ferroviaire sénégalo-malien pour reprendre cette clientèle qui préfère le port d’Abidjan, puisque la vétusté des infrastructures routières causent d’énormes pertes aux opérateurs maliens. Le chemin de fer plus rentable pourrait combler ce manque à gagner. 

Avec la dépréciation des frets maritimes, les prix de l’acheminement terrestre gagne en importance dans la chaine du transport au point de devenir parfois prépondérant car le choix de l’armateur d’un port donné peut être guidé par les critères suivants : la vitesse du parcours terrestre et son cout d’acheminement.

Aussi compte tenu des délais d’empotage et de dépotage, un conteneur passe 2/3 de sa durée de vie à terre et 1/3 en mer. C’est ainsi que les armateurs après avoir fréquenté un port, intègrent l’acheminement terrestre des conteneurs à leur prestation globale. Les transports terrestres dictent ainsi les stratégies et les choix des grands armements

Par fluidité, on entend la libre circulation des marchandises dans l’enceinte portuaire et dans l’Hinterland sans entrave liée par exemple à des problèmes de congestion mais aussi la possibilité d’effectuer des opérations sur  la marchandise comme le dédouanement, en minimisant les contraintes de temps. Or avec l’augmentation considérable des trafics portuaires, la plupart des grands ports se trouvent confronter à des problèmes de congestion qui remettent en cause la fiabilité des chaines internationales de transport dans lesquelles ils s’insèrent.

Cette fluidité est marquée  par l’installation des  HUBS :

Certains ports internationaux sont devenus ce que l’on appelle des hubs .Autrement dit, des zones de concentration et d’éclatement des conteneurs à l’échelle d’un pays voire d’un continent car on y charge et décharge des porte-conteneurs géants qui assurent des lignes régulières indifféremment entre quelques grands ports sur plusieurs continents.

Les ports sont un élément essentiel de la compétitivité d’une ligne maritime. Il faut distinguer le coût du passage portuaire et le coût des services portuaires. Le coût du passage affecte le coût d’exploitation d’un service de ligne régulière car l’attente dans le port transforme le navire en lieu de stockage et conduit à une sous -utilisation de capital, ce qui peut entrainer une suppression de l’escale si ce cout de passage est élevé.

Pour l’accueil d’un navire, le maître mot est la célérité.la vitesse de chargement et de déchargement, la célérité ainsi que la sécurité sont exigées par les armateurs concernant la mise à quai du navire : pilotage, remorquage, lamanage doivent être rapides, efficaces et sûrs. Pour déterminer son choix, l’armateur s’attache  aussi à la qualité des installations portuaires, à la facilité d’accès au quai, à la profondeur des postes à quai et infrastructures servant au traitement des marchandises. Enfin, l’escale doit aussi présenter un attrait commercial. Le port doit être parfaitement intégré dans la chaîne de transport international ; c’est à dire avoir une politique  active de développement.

En effet, le port est un lieu de passage temporaire des marchandises arrivant et repartant de la mer pouvant entrainer le développement du transbordement des marchandises, ce qui a pour conséquence immédiate l’apparition des port hubs où viennent accoster les TGN(très grands navires) qui ne font que les grandes routes maritimes.

Ainsi, les relations entre les ports hubs obéissent à des règles bien définies. En d’autres termes, le choix des ports d’escale par les transporteurs est guidé par trois critères :

  • La position géographique du port dans les réseaux maritimes de navigation
  • La base de cargaison captive du port(Hinterland)
  • La tarification portuaire et la qualité des services et de l’infrastructure

C’est  sur la base de ces critères que les autorités portuaires s’investissent lourdement afin de faire face à la concurrence d’où l’enjeu commercial  des activités portuaires du 21ème siècle.

Donc, l’utilisation de très grands porte-conteneurs est nécessairement liée à l’usage de navires plus petits, comme dans le domaine militaire par exemple : un porte-avion a besoin d’une flottille d’accompagnement pour être efficace.

C’est la raison pour laquelle, les TGPC ne peuvent pas se passer de plus petits  navires qui peuvent être autonomes sur le marché, c’est le cabotage.

Plus précisément, les géants de mer ont besoin de feeders (petits navires) pour la desserte de l’arrière-pays (zone économique d’un port feedering).

Sur ce, il est nécessaire  de distinguer les hubs de transbordement et ceux d’hinterland.

Les premiers accueillent les navires de lignes régulières de grande capacité assurant la desserte de l’avant- pays(ensemble des pays desservis par les lignes régulières qui touchent un port).Ils sont aussi appelés hubs maritimes ou ports pivots car servant de centre d’éclatement pour le transport de marchandises avec les navires-mères engagés sur les grandes lignes transocéaniques.

Les seconds quant à eux assurent la desserte de l’arrière-pays(partie d’un pays en retrait de la zone côtière).C’est pour cela que la connexion entre ces deux types de ports est assurée par le processus de feedering qui est une action de transbordement entre les grands navires de lignes qui font escale dans un nombre réduit de grands ports. Les plus petits navires (feeders  assurant les liaisons secondaires ou de cabotage) acheminent les marchandises vers des ports de plus petites tailles (ports secondaires) que les armateurs ne desservent pas en ligne directe.

Ces ports ne peuvent pas accueillir ces TGPC, donc les feeders viennent chercher les marchandises dans ces  hubs pour assurer la desserte vers les hubs d’hinterland.

De ce fait, l’extension d’un arrière-pays  dépend de l’avant-pays du port, mais aussi des qualités et la densité des réseaux de dessertes terrestres ou encore de la qualité de ses services portuaires et aéroportuaires.

La qualité d’un avant-pays ou d’un arrière-pays est déterminée par les relations fonctionnelles existant entre le port donné et ses zones de desserte.

C’est ainsi que les grands ports jouent un rôle clé dans l’interface terre-mer des façades maritimes et constituent des points incontournables dans les échanges internationaux et domestiques.

C’est dans cette logique, qu’il convient de signaler que la performance des ports dépend de la qualité et de l’étendue de leur avant et arrière-pays.

Monsieur Ibrahima Kamara 

Président du Conseil de Surveillance de l’ANAM(Agence Nationale des Affaires Maritimes)

 

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