Macky Sall est un habitué des coups de Jarnac, en matière de nomination. En effet, la plupart de ses décisions (décrets de nomination) sont irrationnelles et totalement illégales.L’illégalité la plus récente concerne le décret bis « n°2020-964 » instituant l’honorariat, alors que d’une part, l’honorariat a déjà été institué par l’article 51 du décret n°2013-732 du 28 mai 2013, et d’autre part, que ledit article exige que l’honorariat soit accordé uniquement sur proposition du bureau du Conseil Economique, social et environnemental, validée par l’assemblée plénière.
Concernant la situation du juge Demba Kandji récemment détaché à la Présidence (qui attend paraît-il un point de chute), notre démarche vise à alerter nos concitoyens, en amont, pour neutraliser tout projet de nomination illégale.En effet, Il s’agit d’éviter une situation de fait accompli au mois de mois de juin, car Macky Sall est un habitué des forfaitures par surprise.
Commençons par rappeler une évidence juridique que les juristes savent: le médiateur de la République est une autorité indépendante, irrévocable et inamovible.Pour bien comprendre le statut juridique extrêmement protecteur dont jouit le médiateur, il convient de faire un parallèle avec le statut des membres du Conseil Constitutionnel (en termes d’inamovibilité).
*** L’article 5 de la loi organique n°2016-23 du 14 juillet 2016, relative au Conseil Constitutionnel dispose « qu’il ne peut être mis fin, avant l’expiration de leur mandat, aux fonctions des membres du Conseil constitutionnel que sur leur demande, ou pour incapacité physique, et sur l’avis conforme du Conseil ».
*** Aux termes de l’article 5 de la loi N° 99-04 du 29 janvier 1999 abrogeant et remplaçant la loi 91-14 du 11 février 1991 instituant un médiateur de la République « il ne peut être mis fin aux fonctions du médiateur avant l’expiration de ce délai, qu’en cas d’empêchement constaté par un collège présidé par le Président du Conseil constitutionnel… saisi à cet effet, par le Président de la République ».
A la lecture des 2 dispositions, une première observation s’impose : l’autorité de nomination (Macky Sall) ne peut ni mettre fin aux fonctions d’un membre du Conseil constitutionnel, ni à celles du médiateur. Seule une démarche personnelle (démission), une maladie extrêmement grave (incapacité physique), en d’autres termes, un empêchement peut mettre fin à leurs fonctions avant l’expiration du délai prévu par les textes.
La seconde observation est la plus intéressante : aussi bien pour les membres du Conseil Constitutionnel que pour le médiateur, la saisine du Conseil Constitutionnel est une exigence légale pour mettre fin à leurs fonctions. Il appartient au Conseil Constitutionnel, et à lui seul de constater l’empêchement(seul critère), par une décision publiée au journal officiel.
C’est ainsi que le 23 janvier 2002, le Conseil Constitutionnel, a donné un avis conforme à la demande du Vice-Président du Conseil Constitutionnel à l’époque, M. Aziz Ba, qui souhaitait mettre fin à ses fonctions (démission). L’élément fondamental à retenir, c’est que c’est le Conseil Constitutionnel qui a mis fin aux fonctions du Vice-Président du Conseil, puisqu’il est la seule Institution habilitée à le faire. Le président de la république, malgré tous ses pouvoirs est absent de la procédure où il n’a aucune prise.
Nommé par décret n° 2015–1150, en date du 05 Août 2015, le mandat du médiateur actuel M. Alioune Badara Cissé, qui a débuté le 05 août 2015, expire le 04 août 2021. Son mandat unique et non renouvelable de 6 ans est irrévocable et inamovible. Macky Sall n’a aucun pouvoir de mettre fin aux fonctions du médiateur. AUCUN texte ne lui donne ce pouvoir.
Pour mettre fin aux fonctions du médiateur actuel, M. Alioune Badara Cissé, 3 conditions cumulatives doivent être réunies :
1). M. Alioune Badara Cissé devra en manifester la volonté et formaliser, par une lettre écrite, sa volonté de quitter la médiature (lettre de démission adressée à Macky Sall),
2). Le Conseil Constitutionnel dûment saisi par Macky Sall, devra constater l’empêchement,
3). Une décision du Conseil Constitutionnel actant cet empêchement, devra être publiée au Journal officiel (afin que nul n’en ignore, je précise qu’aux termes de l’article 25 de la loi organique n° 2016-23 du 14 juillet 2016 relative au Conseil constitutionnel, « toutes les décisions du Conseil constitutionnel sont publiées au journal officiel »).
C’est seulement au terme de cette procédure que Macky Sall pourra prendre un décret pour nommer légalement Demba Kandji, à la tête de la médiature de la République.
Mais, cela suppose un préalable : que le médiateur actuel démissionne de ses fonctions.
En d’autres termes, seul M. Alioune Badara Cissé est maître de son destin à la médiature et peut décider en toute liberté de mettre fin à ses fonctions de médiateur avant l’expiration de son mandat (le 04 aout 2021).Une telle situation (démission) n’est jamais arrivée : en effet, depuis la création de la médiature, tous les médiateurs ont exercé leurs fonctions jusqu’au terme des 6 ans (voir tableau ci-dessous).
Anciens médiateurs | Période | Durée du mandat |
M. Ousmane CAMARA | De 1991 à 1997 | 6 ans |
M. Seydou Madani SY | De 1997 à 2003 | 6 ans |
M. Doudou NDIR | De 2003 à 2009 | 6 ans |
M. Serigne DIOP | De 2009 à 2015 | 6 ans |
Pour empêcher une nomination illégale (nomination surprise) du Juge Demba KANDJI à la tête de la médiature au mois de juin 2020, nous demandons aux citoyens, ainsi qu’à la presse de prêter une attention particulière aux publications du journal officiel (période allant de début juin à fin juin 2020). Si au cours de cette période, une décision du Conseil Constitutionnel n’est pas publiée constatant l’empêchement de M. Alioune Badara Cissé, alors tout décret pris par Macky pour nommer le Juge Demba Kandji à la tête de la médiature sera illégal, et nul d’effet.
Seybani SOUGOU – E-mail : sougouparis@yahoo.fr