Si cette tournée était destinée à raviver la flamme dans les cœurs de son « titre foncier » électoral, les images de contestations des populations de Saint Louis à Ourossogui en passant par Podor, Matam…. suivies des brimades des nervis pour les porteurs de brassards rouges ou pancartes dénonçant le pouvoir, prouvent à suffisance que Macky Sall a perdu le Nord. Sa tournée dite économique a tourné au vinaigre avec à la clé, un réveil citoyen incarné par Fouta Tampi. Malgré les assurances des responsables locaux de l’APR, la disgrâce du pouvoir a atteint des seuils inquiétants.
C’est une règle désormais classique de notre histoire politique : les tournées ne se déroulent jamais comme prévu (… par les accueils sans heurts ). En rusant sur la véritable destination de sa tournée, le président Macky Sall vient de plonger le Sénégal dans une longue campagne électorale qui ne prendra fin qu’au lendemain de la présidentielle de 2024. Cette tournée n’a dérogé à la règle et risque de consacrer un cycle de violences jamais connu dans ce pays. De mars à nos jours, l’implication et l’impunité qui entourent les actes posés par les nervis, risquent d’influencer beaucoup de faibles d’esprits et d’aventuriers. Et à ce rythme, le sang va couler, beaucoup couler d’ailleurs….
Pour Macky Sall, cette tournée électorale ou plutôt dite économique a sûrement un goût amer. Il subit en effet un quadruple échec. Celui de l’unité de l’APR et de BBY avec des déclarations de candidature, si nombreux et prêts à être éliminés, en particulier ses ministres et directeurs généraux élus dans des communes où l’objectif principal était de déstabiliser l’opposition et de fidéliser les militants. Avec des querelles de chapelles aussi piteuses, impossible – c’est son second échec – de prétendre être celui qui maintiendrait les scores fleuve de la dernière présidentielle et permettre au pouvoir, le parti du Président de préparer sereinement les législatives et présidentielle sans avoir à craindre de se voir imposer la moindre alliance par des compagnons de plus en plus exigeants et gourmands.
Le troisième échec de Macky Sall lors de cette tournée est plus personnel : son choix de « presidentialiser » les élections locales était un contresens. Ses tournées qui vont certainement continuer devraient se poursuivre jusqu’à l’avant-veille du scrutin, ne vont pourtant pas empêcher les électeurs même de son camp, de lui rappeler que, pour eux, les élections locales concernent les communes et les départements.
Dernier échec, et non des moindres : la brutale répression non pas des forces de sécurité classiques (police, gendarmerie) mais de nervis sur des populations choquées et désemparées de constater la valeur de leur suffrage après vote. Ces scènes dignes des pires dictatures de l’histoire et le silence présidentiel, renseignent pour de nombreux sénégalais, sur la qualité de justiciable.
Macky Sall voit commencer à se dissiper la certitude d’affronter les futurs candidats lors de la prochaine présidentielle. Il a fait ses deux mandats et c’est désormais une règle établie : une course au Palais réserve toujours de grosses surprises. La première vient de se produire dans le Nord où la boussole a montré le bon chemin, la porte de sortie honorable….
PAPE SANÉ