À l’issue du Conseil Supérieur de la Magistrature, le président Macky SALL a posé la dernière pierre de son édifice en vue de la présidentielle de 2024. Après le Conseil Constitutionnel présidé par l’un de ses hommes en l’occurrence Mamadou Badio CAMARA, Macky SALL vient de nommer tour à tour Aly Ciré BA à la tête de la Cour Suprême, Hamady DIOUF et Ibrahima BAKHOUM, respectivement 1er président et Procureur général de la Cour d’appel de Dakar ainsi que que Abdoul Karim DIOP qui est désormais le patron du très stratégique parquet de Dakar. Des nominations qui ont eu l’heur de provoquer l’ire de certains magistrats du fait des états de services peu élogieux de la plupart des promus.
Si le président Macky SALL a bien chamboulé la magistrature à travers un jeu de chaises musicales, il a été noté par contre, qu’il a privilégié ses hommes sans tenir compte des critères d’ancienneté. Les exemples font foison mais, les cas les plus particuliers concernent le nouveau Procureur de la République. Abdoul Karim DIOP a été cité en 2012 dans l’affaire tristement célèbre du divorce de l’ancien portier international des Lions Tony SYLVA alors qu’il officiait comme 1er Substitut au parquet de Dakar. Un divorce qui avait coûté toute sa fortune à Tony SYLVA mais également sa douce moitié qui avait convolé en justes noces avec Aïda BA. Une affaire qui avait les choux gras de la presse car, au même moment, l’ex épouse du magistrat, Ngoma SECK révélait qu’Abdoul Karim DIOP l’avait abandonné de même son bébé de 6 mois pour filer le parfait amour avec la désormais ex de l’international sénégalais. A son nouveau poste, le successeur du décrié Hamady DIOUF poursuivra sans aucun doute l’œuvre de son prédécesseur.
Autre nomination fortement décriée, c’est celle de Ibrahima BAKHOUM. Le nouveau Procureur général près de la Cour d’Appel de Dakar, avait été suspendu en 2006 dans la sinistre affaire de corruption dans la magistrature. Ibrahima BAKHOUM, à l’instar des autres mis en cause, s’était vu interdire d’exercer ses fonctions le temps que le Conseil supérieur de la magistrature décide de son sort. Mais, contrairement aux autres, le prédécesseur de Bamba Niang au poste de 1er substitut du procureur de la République avait été rattrapé par le dossier.après l’éclatement du scandale de la corruption dans la justice.
Dans cette affaire, pour rappel, après l’avocate générale, Aminata Mbaye, le premier substitut du procureur de la République, Bamba Niang, le juge Turpin, le greffier, Yabal Dieng,Ibrahima Bakhoum s’était également attiré les foudres du ministre de la Justice.Car, contrairement aux autres mis en cause, Ibrahima BAKHOUM avait été le premier à avoir enrôlé l’affaire opposant Mohamed Guèye à Momar War Seck en sa qualité de premier substitut du Procureur de la République avant d’être remplacé à ce poste par Bamba NIANG, également cité dans cette affaire de corruption, avant d’être affecté à Ziguinchor. L’avocate générale, Aminata Mbaye, avait d’ailleurs fait allusion à ces ‘affectations-sanctions’ qui permettent à la magistrature de laver le linge sale en famille. En reconnaissant, au passage, que la corruption a toujours existé dans la magistrature.
Quid du tout nouveau président de la Cour Suprême, jadis considéré par ses pairs comme l’un des dignes successeurs de feux Kéba MBAYE, Ousmane GOUDIAM, Amadou Louis GAYE, etc…, a vu sa côte baisser après le rejet de la requête de la coalition Yewwi Askanwi sur l’ouverture des caisses contenant les procès-verbaux des départements de Podor, Ranérou, Karel et Matam lors des législatives de juillet 2022. En 2013 également, la nomination de Aly Ciré BA comme Administrateur des Chambres Criminelles devant juger feu Hisséne HABRÉ, était décriée. Car, pour la désignation de l’Administrateur de ces chambres, notamment dans le statut qui les régit – validé par l’UA et le Sénégal – il était prévu dans l’article 15 : « Le Président de la Commission de l’UA nomme un Administrateur des Chambres Africaines ». Et voilà que le texte de cet article, ou plutôt la page 5 de l’Accord officiel, a été remplacée par une autre page dans laquelle l’article 15 est devenu : « Le Ministre de la justice de la République du Sénégal nomme un Administrateur des Chambres africaines extraordinaires », lit-on sur le portail Tchadien ZoomTchad.
Cette manipulation des textes officiels est extrêmement grave, en particulier à ce niveau de responsabilité, mais elle permet aussi de constater où se nichent certaines préoccupations au sommet de l’Etat du Sénégal. Cette fraude institutionnelle couverte par toute une chaîne de complicités n’est pas la seule, les violations des principes généraux qui guident l’administration d’un procès juste et équitable sont incalculables dans cette affaire où les principaux acteurs sont guidés par l’adage « la fin justifie les moyens ». La politique plutôt que le Droit. Vu son engagement et ses prises de position dans la procédure judiciaire antérieure, M. Ali Cyré BA est aujourd’hui disqualifié et frappé par le régime des incompatibilités, précisément pour cause de suspicion légitime quant à son impartialité.
Quant au dernier larron, la nomination de l’éphémère Procureur de la République Hamady DIOUF 1er président de la Cour d’Appel au sortir du Conseil Supérieur de la Magistrature, est perçu comme une continuité dans l’action. Car, en l’espace de 12 mois à la tête du parquet de Dakar, Hamady DIOUF a permis des arrestations les unes plus incongrues que les autres. Mais, du haut de son nouveau piédestal, fera face aux conflits d’intérêts et l’évidente partialité car, pour avoir entrepris en poursuite, ne peut être juge et partie dans un même dossier.
Petit à petit, Macky SALL tisse sa toile en route pour un troisième mandat. Contrairement aux propos prêtes au président ivoirien Alassane Dramane OUATTARA qui trouve que son « jeune frère » manque de fermeté vis-à-vis de son principal opposant Ousmane SONKO. Depuis sa réélection en 2019, le président sénégalais dont la Constitution limite le nombre de mandats à deux consécutifs, place ses hommes dans un jeu d’échec. Après la modification de la Loi 2017-10 du 17 janvier 2017 portant Statut des magistrats, permettant à quelques uns de bénéficier d’une retraite à 68 ans et non à 65 ans, le président Macky SALL préparait l’arrivée de l’ancien président de la Cour Suprême à la tête du Conseil Constitutionnel.