samedi, 23 novembre 2024 03:40

Sénégal : Avec plus d’une vingtaine de morts, des centaines de blessés, des organisations de défense des droits humains invitent à un « examen complet » des pratiques de maintien de l’ordre

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Sénégal
Atlanticactu / Dakar / Cheikh Saadbou Diarra
Après les séances de gazage de leaders de l’opposition manifestant contre la loi sur le parrainage ou l’arrestation de Khalifa Sall, lors du premier mandat de Macky Sall, il était impensable d’imaginer que des années plus tard, les manifestations pouvaient être à l’origine de morts d’hommes. De février à mars 2021 et durant le mois de juin dernier, le Sénégal a offert une hideuse image de la répression policière. Entre 30 morts, selon les chiffres du ministère de l’intérieur et 40 selon les organisations de défense des droits de l’homme ou les partis politiques. Des chiffres qui font froid dans le dos d’où l’appel lancé à permettre aux manifestants d’exprimer leurs préoccupations et de faciliter une résolution pacifique des conflits sociaux ».
« Comment on peut mourir lors d’une manifestation en 2023 ? », s’est interrogé Seydi Gassama le Directeur exécutif d’Amnesty International / Sénégal qui a constaté des violences « alarmantes » ces dernières années. S’il ne met pas en doute le professionnalisme des forces de défense et de sécurité, M. Gassama qui depuis, ne cesse de tirer sur la sonnette d’alarme après plusieurs bavures dans les commissariats et brigades de gendarmerie, exige  des autorités d’entreprendre un « examen complet » des pratiques de maintien de l’ordre en exprimant son inquiétude face aux « allégations d’un usage excessif de la force ».
Son point de vue sera partagé par le Coordonnateur départemental du Forum Civil de Bignona, l’un des départements les plus endeuillés lors des manifestations. Pour Abdoulaye Diallo, « Nous appelons les autorités à entreprendre un examen complet de leurs stratégies et pratiques en matière de maintien de l’ordre et surtout de l’usage de certains types d’armes afin de permettre aux manifestants d’exprimer leurs revendications et de faciliter une résolution pacifique des conflits sociaux ».
« Toute stratégie de maintien de l’ordre doit respecter les principes de nécessité et de proportionnalité », a insisté Abdoulaye Diallo dont l’organisation est montée au créneau à chaque fois de besoin pour désamorcer des situations à Bignona. Très écouté dans le département, celui qu’on dénomme le « Social Man », aura étouffé dans l’œuf tensions mais, « les autorités doivent nous faciliter la tâche en proscrivant tout usage d’arme létale contre les manifestants car, il est inconcevable que Bignona paie le plus lourd tribut à chaque manifestation », a-t-il ajouté.
Au delà des organisations sénégalaises, d’autres comme le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, se sont également inquiétés sur le nombre de morts et blessés par balles à chaque manifestation. D’ailleurs, le Conseil des droits de l’homme rappelle qu’il avait déjà demandé au Sénégal, de respecter ses obligations internationales afin « de faciliter et protéger les manifestations pacifiques ».
« Considéré comme une démocratie majeure en Afrique, le Sénégal ne doit pas se taire sur ces pratiques Anti-démocratique »
Ce qui est constant, remarque Amadou Ba Juriste et membre de Pastef, le parti qui a le plus été touché par le nombre de morts, de blessés et d’arrestations depuis 2021,  « le manque de retenue dans l’usage de la force à l’encontre des populations qui revendiquent de manière pacifique contre l’arrestation ou le verdict infligé à leur leader Ousmane Sonko, serait non seulement anti-démocratique, mais profondément inquiétant pour l’État de droit ». Amadou Ba dénonce en particulier la présence de chiens notamment lors des heurts à Ngor, l’usage de grenades de désencerclement  ou encore les tirs de LBD par des membres des forces de l’ordre juchées sur des voitures ou terrasses de maison et la présence de Nervis armés de fusils d’assaut pour faire face à des manifestants non armés.
Selon le Coordonnateur départemental du Forum Civil de Bignona, «  Pourtant, c’est la constitution qui garantit la liberté de manifester à ces jeunes qui exigent simplement leur participation aux processus décisionnels concernant leur avenir, l’accès aux ressources naturelles, la protection des droits humains, la dignité et l’égalité ».
Et Abdoulaye Diallo de poursuivre, « Nous sommes conscients que des actes de violence isolés commis par certains manifestants peuvent blesser des membres des forces de l’ordre et endommager des biens publics, ce que nous dénonçons également » mais, « il est clair que le nombre de blessés enregistré parmi les manifestants de même la gravité des violences sont alarmants ».
Plusieurs personnes victimes de ces violences gardent des handicaps à vie et, malgré les promesses du président Macky Sall de les prendre en charge – depuis le 8 mars 2021 et récemment – rien a été fait. Plus grave, des victimes ont saisi la justice contre des personnes identifiables ayant exercées des violences inhumaines mais, aucune action n’a été déclenchée par les autorités judiciaires.

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