Les fidèles de l’imam Mahmoud Dicko ont réclamé dimanche des explications à la junte malienne pour l’emploi la veille de lacrymogènes lors d’un rassemblement célébrant le retour de l’étranger de cette importante figure religieuse et politique. Que représente le gazage, ce samedi, du cortège de l’imam Mahmoud Dicko au retour de ce dernier de l’Arabie Saoudite, dans le tableau des relations entre tombeurs de feu Ibrahim Boubacar Keïta?
De retour de l’Arabie Saoudite, où il a été élu membre Permanent du bureau de la Ligue Islamique Mondiale, le convoi de l’imam Mahmoud Dicko a été victime, ce samedi 14 janvier, de jets de gaz lacrymogènes. Une « agression » condamnée par la CMAS (Coordination des Mouvements, Associations et Sympathisants de l’Imam Mahmoud DICKO).
« Nous avons été surpris de l’agression du convoi de l’imam », a écrit la CMAS dans un communiqué publié ce dimanche 15 janvier 2023, et « relatif à l’agression du cortège de l’imam Mahmoud Dicko ». Sur les circonstances de l’ « agression », la CMAS informe que ses partisans ont d’abord été « surpris par l’important dispositif sécuritaire déployé à l’aéroport ». Des éléments de la Garde nationale et de la police déployés pour le maintien de l’ordre.
Face au dispositif de sécurité, l’ordre avait été donné à tous les partisans de l’imam de « respecter » les consignes sécuritaires. Cependant, malgré le respect de cette consigne, la CMAS constate que le convoi de l’imam Dicko a été « agressé ». Les tirs de lacrymogènes imputés aux forces de l’ordre ont suscité beaucoup d’attention du fait de l’influence prêtée à l’imam Dicko et de l’intérêt porté au moindre signe de tension potentielle dans un contexte de monopolisation du pouvoir par les militaires.
Il y a un certain temps déjà que le feu couve. Entre la junte militaire au pouvoir à Bamako et le M5, le Mouvement du 5 juin qui, avec le Rassemblement des forces patriotiques a constitué le fer de lance de la chasse à IBK, ce ne sont pas les frictions qui ont manqué, même si le leader religieux charismatique avait dit déposer les armes pour retourner à son tapis de prière. Sorti de sa réserve face aux dérives des putschistes, l’homme de Dieu a même traité les nouveaux patrons de Bamako, de «dirigeants arrogants» qui gagneraient à changer le fusil d’épaule, au propre comme au figuré, pour éviter de «commettre les erreurs du passé». La dernière pomme de discorde? La Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’imam Mahmoud Dicko (CMAS) est vent debout contre le projet de nouvelle constitution que la junte tient mordicus à faire passer au forceps.
Le religieux et ses partisans ne font pas mystère de leur hostilité à l’initiative, conscients qu’en Afrique, le referendum et les élections ne sont organisés que pour être remportés par ceux qui les ont organisés. C’est ainsi que la candidature du colonel Assimi Goïta pour la prochaine présidentielle est déjà réclamée par un certain «Collectif pour 5 ans ou plus». Pour ce rassemblement aux desseins très peu voilés, cette requête visiblement suscitée par ceux à qui elle profite, entre dans la logique de «préserver la souveraineté retrouvée». Le mot est lâché. Cette «souveraineté» dont se vante la junte, alors qu’en plus d’autres réalités, une bonne partie du territoire national, paradoxalement censé être défendu par Assimi Goïta et ses soldats, est aux mains des terroristes qui sèment au Mali, larmes et désolation au quotidien.
L’imam Dicko a été la figure tutélaire d’un mouvement de contestation qui a précédé le renversement du président Ibrahim Boubacar Keïta par les colonels en 2020. Il a ouvertement exprimé ses désaccords avec la junte.