« Tant que la police ne comprendra pas qu’elle ne sait pas tout faire et qu’elle ne peut pas tout faire toute seule, elle n’avancera pas. »
Naguère citée parmi les meilleures polices du continent, adulée par les Sénégalais, la police nationale est en train de procéder à une mutation qui l’éloigne de plus en plus de ses missions républicaines. À l’origine, ses missions étaient la garantie des libertés individuelles et collectives, la défense des institutions de la République, le maintien de la paix et de l’ordre public et la protection des personnes et des biens. Mais, depuis quelques années, la notion de « Garantie des Libertés individuelles» semble vidée de sa consistance et ce, pour les beaux yeux du Prince. D’où la question suivante : la police peut-elle encore se remettre en question ?
Du grec politia, signifiant « art de gouverner la cité », la Police applique la loi pénale votée par l’Assemblée Nationale et les règlements qui précisent la loi ; elle est placée sous l’autorité des pouvoirs publics en place. Elle remplit trois missions prioritaires et fondamentales : la protection des personnes et des biens ; la police judiciaire ; le renseignement et l’information, se concentrant selon cinq axes : assurer la sécurité des personnes, des biens et des institutions, lutter contre la criminalité organisée, la grande délinquance et la drogue, protéger le pays contre la menace extérieure et le terrorisme, et maintenir l’ordre public. Mais, le législateur insiste sur le Respect des Libertés Individuelles et Collectives, comme s’il soupçonnait une volonté ultérieure du politique d’essayer de remettre en cause ces libertés.
Les événements de 1962 qui avaient vu les principales prérogatives de la police ( Garde Républicaine) à l’époque , transférées à la gendarmerie et la radiation des Personnels en 1988, semblent avoir tétanisés ce corps d’élite. En effet, il est constaté souvent que ceux qui incarnent le pouvoir ne se gênent pas de féliciter cette police dans ses plus grandes dérives. N’a t-on pas vu l’une des plus hautes institutions du pays « féliciter » la police pour avoir gazéifié les leaders de l’opposition à l’occasion d’une manifestation ? Après avoir »durci » son discours sur le maintien de l’ordre, à travers les réformes du Code pénal notamment la Loi n° 2016-29 du 08 novembre 2016 modifiant la loi n° 65-60 du 21 juillet 1965 portant Code pénal.
Rien que l’EXPOSE DES MOTIFS dénote d’une volonté de « contourner » la Garantie Constitutionnelle des Libertés.
En vue de mettre la loi pénale nationale en conformité avec les traités ratifiés par le Sénégal et de sanctionner ainsi des faits répréhensibles non pris en compte dans la loi actuellement en vigueur, des modifications du Code pénal s’avèrent nécessaires par la création de nouvelles incriminations. Il s’agit notamment de :
– l’atteinte à la vie privée et à la représentation de la personne par captation d’image ou de son ;
– la mise en danger d’autrui, la fausse alerte.
En outre, pour lutter plus efficacement contre le terrorisme, il est impérieux de modifier certaines infractions et d’en prévoir de nouvelles. C’est ainsi que sont désormais incriminés lorsqu’ils sont en lien avec le terrorisme :
– le recrutement de personnes pour faire partie d’un groupe ou pour participer à la commission d’un acte terroriste ;
– la fourniture de moyens ;
– l’entente, l’organisation ou la préparation d’actes terroristes ;
– la non dénonciation d’actes terroristes ;
– le recel de terroriste ;
– la participation à un groupe terroriste.
Il a paru nécessaire de renforcer la lutte contre le cyberterrorisme ainsi que de toute autre forme de délinquance perpétrée par le biais de moyens électroniques et de son utilisation possible à des fins terroristes.
Ce que les Sénégalais attendent de leurs forces de sécurité et principalement de leur police en ces temps où les dérives se multiplient au moment où la lutte pour le respect des libertés fait rage. Seule une police républicaine à l’image de celles des grandes démocraties peut aider à ramener la sérénité
Nous attendons de nos policiers et de nos gendarmes la plus grande déontologie. Il y a eu certes des comportements qui ne sont pas acceptables. Les images de policiers violentant des manifestants même si ces derniers ne peuvent être dédouanés de la provocation provoquée, ne rendent point service à l’image du pays. De même, des arrestations qui souvent sont qualifiées d’illégales foisonnent de même que les mesures de garde à vue pour des infractions de simple police, rendent difficile l’une des missions premières de la police qui est d’EDUQUER AVANT DE RÉPRIMER.
Faut-il que cette police, notre police soit à l’écoute du Président de la République pour l’entendre dire, « Assez de violences gratuites, « Je serais intraitables, j’attends de nos policiers et de nos gendarmes la plus grande déontologie. Il y a eu très clairement des comportements qui ne sont pas acceptables. » , avant de revenir aux fondamentaux. Non, vous n’avez pas le droit d’attendre car « C’est l’honneur de la police qui est en jeu, on ne fait pas de croche-pied à l’éthique, sauf à s’abaisser, à abaisser la police. »
Non, Chers policiers de tout grade, nous savons pertinemment que ceux-là qui disent que, « la police pâtit d’un manque de formation, d’entraînement et de cohésion, dû notamment à une adaptation « dans l’urgence » de la doctrine du maintien de l’ordre, ont tort même avec la répétition de la contestation qui vire vers une généralisation qui risque de devenir plus tard une GESTION DES CRISES. Une situation crainte par toutes les Forces de l’ordre.
Sans vous apprendre votre mission, nous vous demandons de mieux appréhender votre rôle dans la société. Faites votre de L’ORDRE DE LA LOI ET LE COMMANDEMENT DE L’AUTORITÉ LÉGITIME ?
D’ores et déjà, « les textes de loi sont très complets. Le problème est qu’ils ne sont pas toujours respectés. » Il renvoie à la notion d’« illégalisme », qui désigne « les petits arrangements avec les règles propres à une profession ». Celle de policier y serait particulièrement exposée : « Regardez l’obligation de porter le référentiel des identités et de l’organisation (RIO) qui est en théorie effective depuis toujours, mais qui est en réalité très peu appliquée. » Sans que cela n’induise généralement de sanction. Ce numéro d’identification des policiers, est obligatoire et pourtant, l’autorité ferme les yeux.
Et plus grave, cette autorité piétine les textes qui régissent le fonctionnement de la police en envoyant en toute illégalité des agents NON IDENTIFIABLES INTERPELLER DES MANIFESTANTS AU PÉRIL DE LEUR VIE
Les policiers n’ont pas besoin de voir ajouter des règles à leur fonctionnement, mais plutôt un renforcement des interdits et obligations, ainsi que leur rôle dans la société. Par exemple, « Les policiers allemands ont des cours de rhétorique afin d’améliorer le dialogue avec les citoyens. Plus généralement, l’Allemagne, le Canada ou le Royaume-Uni font preuve d’une bien plus grande ouverture vers la société civile et sont ainsi mieux compris par la population. »
Contrairement au Sénégal qui puise des expériences en France où « la socialisation professionnelle est très forte chez les policiers, il y a un fort besoin de conformité. Et malheureusement, l’habitude fait que l’on va reproduire les mêmes comportements plutôt que d’appliquer ce que l’on a appris à l’école. »
Pape Sané
Journaliste Spécialisé en Défense
Et Sécurité
Email : paysane@yahoo.com