Ce sera une première en France avec un ancien président qui va comparaître devant le tribunal de Grande Instance de Paris. Nicolas Sarkozy pour ne pas le nommer sera, à partir de ce lundi 23 novembre, et jusqu’au 10 décembre, jugé devant le tribunal correctionnel de Paris dans l’affaire dite « des écoutes ». L’ancien chef de l’Etat est poursuivi pour corruption et trafic d’influence. Son avocat et un ancien magistrat comparaissent également. Il sera sur le banc des prévenus avec son ami et avocat personnel, Me Thierry Herzog, et l’ancien haut magistrat Gilbert Azibert.
Six ans après sa mise en examen dans ce dossier, Nicolas Sarkozy doit finalement comparaître à partir de ce lundi 23 novembre devant le tribunal correctionnel de Paris dans l’affaire des écoutes, autrement appelée affaire « Paul Bismuth ». L’ancien chef de l’Etat est poursuivi pour « corruption » et « trafic d’influence ».
Tout a démarré en 2013. A l’époque, l’ex-président de la République est soupçonné d’avoir obtenu de l’argent de la part du régime de Khadafi pour financer sa campagne de 2007. Il est alors placé sur écoute mais les juges d’instruction découvrent qu’il utilise une sorte de « ligne secrète » pour communiquer avec son avocat. Cette ligne prépayée a été ouverte par son conseil au nom de « Paul Bismuth ».
C’est en plaçant cette ligne sur écoute que les magistrats vont soupçonner les faits de corruption et trafic d’influence. En lisant les retranscriptions, ils en déduisent que Nicolas Sarkozy et son avocat, Thierry Herzog, tentent de convaincre un magistrat de la Cour de cassation de leur fournir des informations dans le cadre d’une autre affaire, l’affaire Bettencourt, dans laquelle Nicolas Sarkozy vient tout juste d’être blanchi. Entre contrepartie, l’ancien chef de l’Etat dit être prêt à aider le magistrat, Gilbert Azibert, à obtenir le poste qu’il convoite au Conseil d’Etat de Monaco.
Des écoutes remises en cause
Dans ce dossier, les écoutes réalisées sur le téléphone de Nicolas Sarkozy – alias Paul Bismuth – ont été vivement contestées. En effet, théoriquement, les conversations entre un justiciable et son avocat ne peuvent pas être enregistrées car elles appartiennent au secret professionnel. Il existe cependant une exception : si l’avocat lui-même est soupçonné d’une infraction.
Jugeant ces écoutes contraires au respect du droit de la défense, Nicolas Sarkozy et Thierry Herzog ont tenté de les invalider. Mais la Cour de cassation a rejeté leur pourvoi en mars 2016. Ils ont également tenté, comme Gilbert Azibert, de faire annuler leur renvoi en correctionnelle mais la Cour de cassation a confirmé ce renvoi en juin 2019. Gilbert Azibert et Thierry Herzog sont également poursuivi pour « violation du secret de l’instruction ».
Qui est cette « taupe » tant recherchée dans cette affaire ?
Il s’agit de l’affaire dans l’affaire. Nicolas Sarkozy et Thierry Herzog ont-ils été mis au courant qu’ils étaient écoutés ? C’est ce que soupçonnent des magistrats, après avoir entendu, pour la première fois, l’ancien Président évoquer le nom de Gilbert Azibert sur sa ligne officielle, et non sur la ligne prépayée. Le Parquet national financier épluche alors les relevés téléphoniques détaillés, les « fadettes »,de ténors du barreau, dont Eric Dupond-Moretti, l’actuel ministre de la Justice, pour tenter de retrouver la « taupe ».
Cette enquête a provoqué un tollé. En septembre dernier, l’Inspection général de la justice a été chargée par la Chancellerie d’ouvrir une enquête administrative contre des magistrats du Parquet national financier. Une enquête ouverte après la remise d’un rapport sur le rôle du PNF dans lequel l’IGJ n’avait pas constaté de dysfonctionnement majeur, mais « des faits […] susceptibles d’être regardés comme des manquements au devoir de diligence, de rigueur professionnelle et de loyauté ».
Avec de telles charges, que risque Nicolas Sarkozy ?
D’après l’article 433-2 du Code pénal, le chef de « trafic d’influence » est puni de cinq ans de prison et 500.000 euros d’amende. Nicolas Sarkozy est aussi mis en examen pour « corruption active ». Un délit passible d’une peine pouvant aller jusqu’à dix ans de prison et un million d’euros d’amende (article 433-1 du code pénal).