vendredi, 29 mars 2024 13:54

Opinion : Covid-19 : Partageons dans la dignité…

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Par Ibrahima Cheikh Diong,

Fondateur et Président de ACT Afrique Group. Ancien Ministre, Conseiller Spécial du Président de la République du Sénégal, Ancien Directeur Général de la Coopération Internationale du Sénégal, Ancien fonctionnaire international de la Banque Mondiale et la SFI, Ancien Conseiller Principal Afrique de la BNP Paribas et Ancien Directeur Associé Afrique de Booz, Allen & Hamilton.

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Le coronavirus est là, espérons qu’il disparaîtra un jour, pour ne plus jamais revenir afin que nous reprenions nos vies et nos activités. Mais, quelques belles histoires humaines et inspirantes qui en sortiront laisseront des souvenirs gravés en nous, pour toujours.

Voici la mienne en 10 points, l’histoire et les leçons de politiques publiques:

1. J’ai observé…

Alors que je faisais ma marche quotidienne dans les rues de mon quartier à Dakar (Les Almadies) pour préserver ma santé mentale et physique malgré le confinement partiel et le couvre-feu national au Sénégal, j’ai remarqué 4 dames, courageuses et dignes, qui vendaient, sans masques ou autres protections, toutes sortes de petites marchandises (noix, fruits, etc.). Malheureusement, il n’y avait presque aucun client autour d’elles à cause du virus.

Pourtant, je suis convaincu que les recettes de ces petits commerces serviraient certainement à nourrir leurs petites familles, en particulier leurs enfants qui les aident d’ailleurs dans ce petit commerce plutôt que d’étudier ou de jouer comme les autres enfants du quartier privilégié des Almadies.

2. J’ai constaté…

Ces dames semblent toutes avoir une chose en commun: beaucoup de marchandises invendues tout au long de la semaine à cause d’absence de clients dûe au coronavirus.

Cependant, ces femmes et leurs enfants semblaient tous garder une grande dignité et un gros sourire sur leurs visages chaque fois que je leur disais bonjour. Ce respect de leur dignité m’a d’ailleurs amené à ne pas montrer leurs visages dans ces photos de leurs marchandises

3. J’ai agi …

Après une semaine de marche tout en observant tous les jours cette vue insupportable (qui m’a rappelé les petites commerçantes de ma jeunesse dans ma ville natale de Thiès), j’ai décidé de les contacter pour savoir ce que je pouvais faire modestement pour faire preuve de compassion et de soutien, sans aucune démonstration de pitié de ma part envers elles, car après tout, elles gagnaient leurs vies à leurs manières et honnêtement .

J’ai demandé à chacune d’elles comment elles géraient l’impact visiblement négatif du coronavirus sur leurs petits commerces et que faisaient-elles pour trouver des acquéreurs pour leurs marchandises ou gérer leurs invendus. Elles m’ont affirmé qu’elles vendaient peu et que leurs stocks invendus coûteraient environ 10 000 Fcfa (équivalent à 15 USD) par stand! Au total, 40 000 Fcfa (75USD) pour les 4 dames.

Alors, je leur ai proposé d’acheter (le mot clé ici est acheter, pour respecter leur dignité, au lieu de leur faire un don) tous leurs invendus du jour. Les produits achetés ont ensuite été distribués aux gardiens des maisons aux alentours qui suivaient avec surprise nos échanges (bien sûr, j’avais mon désinfectant pour m’assurer que toutes les personnes, surtout ces bonnes femmes, qui étaient impliquées dans la transaction, étaient protègées, coronavirus oblige.

Des fruits et des cacahuètes proposés à des clients... qui se font rares.

Des cacahuètes et des noix proposés à des clients… qui se font rares…

4. J’ai impacté modestement…

Je sais que mon geste symbolique (que j’aurais pu simplement garder pour moi mais l’histoire m’a tellement inspiré pour ne pas la partager) ne résoudra certainement pas toutes leurs difficultés du moment, mais pourrait leur apporter un petit soulagement à ces moments difficiles pour tous, même si certains d’entre nous s’en sortent mieux financièrement.

5. J’ai beaucoup appris…

Voici la meilleure partie de cette histoire. Alors que je continuais ma marche pour rentrer chez moi, je ne savais pas que 5000 Fcfa (8USD) était tombé de ma poche par accident et l’une des 4 femmes qui l’avait vu, a ramassé le billet et a couru vers moi pour me rendre mon argent. Je ne pouvais imaginer un meilleur geste d’honnêteté et de dignité car, malgré leurs difficultés financières apparentes, cette dame a choisi de garder sa fierté, son honnêteté et sa dignité en me rendant mon argent. Quel geste hautement humain et plein de bonnes leçons de valeurs pour nos enfants et pour l’humanité !

6. Morale de l’histoire…

Alors que certains d’entre nous ont encore la chance de pouvoir s’approvisionner dans des chers supermarchés du coin, il y a des gens autour de nous (sans-abri, petits commerçants, handicapés, mendiants, etc.) qui sont dans le besoin. Puisez dans votre cœur pour les aassister, si vous le pouvez, mais d’une manière digne, sans que cela soit une question de gloire pour vous !

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Garder sa dignité et ne pas tendre la main…

 

7. Les héroïnes …

Encore une fois, rappelez-vous que les vraies héroïnes de cette belle et inspirante histoire sont ces 4 dames (et surtout pas moi) qui continuent de vendre leurs produits et se battent quotidiennement pour leurs familles malgré les risques de coronavirus.

8. Partageons…

Ces moments difficiles, qui seront certainement derrière nous un jour, nous interpellent tous humainement. Il est grand temps de réveiller en nous nos grandes et belles valeurs humaines, dormantes pour certains, et partager avec les moins nantis que nous.

9. Un état doit être présent en cas de catastrophe…

Au moment où les pays développés distribuent des chèques a tort et à travers a leurs citoyens en difficulté et/ou en chômage c’est le moment pour nos états en Afrique de revoir nos politiques sociales et de solidarité parce qu’un état doit être présent en cas de pandémie et/ou autres catastrophes. Gouverner c’est anticiper !

10. Soutenons le secteur informel en Afrique…

Nous souhaitons certes que nos économies post-covid 19 se reconstruisent pour retrouver ou dépasser les niveaux de croissance d’avant. Dans ces efforts de nos gouvernements, n’oublions pas de soutenir le secteur informel en Afrique en leur aidant dans la formalisation de leur business et, en leur facilitant l’accès au financement et au marché. Faut-il, enfin, encore le rappeler, 80% des emplois en Afrique proviennent du secteur privé (informel et formel).

Profitez de cette modeste nourriture de l’esprit et protégez vous

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